in

L’hommage de Marlène Emvoutou à son père Gervais Mendo Zé

b2dc6c8f7f725fa5a7a53266444c0634 XL

Le Professeur Gervais Mendo Zé, fondateur de la chorale « La voix du Cénacle » et ancien Directeur générale de la Cameroon radio television (CRTV) a rendu l’âme ce vendredi 9 avril 2021 à l’hôpital central de Yaoundé.

b2dc6c8f7f725fa5a7a53266444c0634 XL
Pr Gervais Mendo Zé (c) Droits réservés

Depuis la survenue de cette nouvelle, des hommages fusent… Dans une publication dans les réseaux sociaux le 10 avril, sa fille Marlène Emvoutou revient sur la vie et l’œuvre de l’enseignant émérite des universités.

Lebledparle.com vous livre dans son intégralité, le témoignage de Marlène Emvoutou…  

Papa, mon complice.

 Depuis hier, j’ai cessé d’être la fille d’un voleur… J’ai entendu de très beaux témoignages sur toi.

 Tous les médias nationaux et internationaux ont souligné ton œuvre immense…

 Les intellectuels et hommes politiques de notre pays ont salué ta mémoire. Je voulais te dire combien de fois, je suis fière de toi.

 Mais, je sais que tu ne m’entendras plus. Du moins, pas avec les oreilles humaines. Hier, quand j’ai appris que tu as enfin rendu ton âme au seigneur, en toute discrétion, et dans la dignité. Voilà l’homme que tu es…

Je me suis subitement souvenue que, tu as toujours voulu que je sois présente à chaque événement important de ta vie. Après 4 ans d’exil en France, tu as voulu que je vive ce jour, sur le sol de nos ancêtres. Alors, j’ai souris. Mais subitement les larmes ont mouillé mes joues.

 Papa, 

Je ne parlerai jamais de ta mort, car un artiste, un écrivain, ne meurt jamais.

 Professeur,

Tu m’as dit un jour, « ma fille, les hommes les plus beaux ont un cœur sombre ».

 La meilleure leçon que j’ai apprise… Tu as décidé de faire de ta vie, un conte de fée.  Tu voulais donner de l’espoir à ceux qui avaient tout perdu. Tu étais le soutien des plus démunis. Tu étais à l’aise avec les puissants de ce monde comme avec les plus fragiles …

 Papa, 

Tu as un cœur blanc. Mais tu aimais t’habiller en rose… Tu arrachais des sourires à ceux qui n’avaient aucune fortune avec ton style vestimentaire.

 Berger,

 Le seigneur t’a jeté dans la fosse aux lions. Tu as prêché parmi les pêcheurs comme toi… Tu leur redonnais de l’espoir, et cette noble mission t’a permis de tenir bon durant ces 7 années de calvaire.

Pour approfondir :   Issa Tchiroma Bakary : « International Crisis Group ne mettra plus ses pieds au Cameroun »

 Papa,

 Tu as souffert dans ta chair. Mais, cette nuit dans mon rêve tu étais si heureux. Il y avait des enfants autour de toi …

Tu as gardé ton âme d’enfant et, ta voix si suave, trahissait cette naïveté qui te faisais croire que tout le monde pouvait t’aimer. Malheureusement, un dicton français dit qu’on ne peut pas plaire à tout le monde…

 Monsieur le ministre, 

Tu as décidé de quitter le pays ! De nombreux jeunes disent qu’ils attendent leurs cartes d’identité pour boza. Que le pays les dépasse.

 Je sais que tu comprends désormais ces expressions des ngataman. Toi le stylisticien, qui tenait à l’esthétique de la langue française…

 Tu peux déjà comprendre que c’est difficile pour eux, de voir des vieillards de plus de 70 ans qui travaillent pendant qu’eux sont au chômage…

Mon complice, 

Personne ne sait que c’est toi qui m’as transmis l’amour pour le football. Le soir, où nous restions tous les deux à ta véranda, tu me racontais tes prouesses de gardien de but.

 C’est le seul moment où ton visage prenait tout son sérieux… Je sais que tu aurais voulu être une star du football, dans un pays où le football est mieux organisé. 

 Mon confident,

Tu me disais de ne pas dire haut ce que je pense, que cela m’attirait des ennemis, tu avais raison.

 Ils m’ont eu, ils m’ont jeté en prison pour le délit de bouche. Je sais que tu souris …

Tu adorais mon sarcasme linguistique. Mais, je pense très sérieusement qu’un chien qui a une queue ne doit jamais sacrifier sa queue pour plaire à son maître… Car, lorsqu’il vieilli, et qu’il a des plaies inguérissables, sa queue aurait servi à chasser les mouches qui sucent son sang.

 Papa,

Tu t’es sacrifié pour ce pays sans rechercher la gloriole. Tu t’es mis au service d’un homme d’État. Le président Paul Biya, tu lui as été fidèle.

 Cette fidélité, je la tiens de toi… tu lui as voué une admiration quasi messianique. Tu voulais tout faire pour qu’on te cite parmi les plus fidèles. Mais tu en as trop fait… Ils t’ont eu à ton tour.

Pour approfondir :   Cameroun : Ebanga Maurice, le photographe fétiche des Lions indomptables est mort !

 Papa, 

Ce n’est pas la fin, mais le début de long combat qui va aboutir au changement des comportements dans notre pays. 

 Je disais à mes amis qu’il est inadmissible que, l’on sorte des vieillards de plus 65 ans de leurs retraites méritées pour les jeter dans le bruit et les odeurs des prisons, pour des fautes de gestions financières. 

Que des alternatives pouvaient être envisagées, comme le port des bracelets électroniques, qui leur permettraient de purger leurs peines à domicile entouré de leurs petits-enfants.

 Je trouve que notre société est ingrate envers cette couche sociale qui nous lègue un pays en paix…

 Une prison n’est pas une maison de retraite. C’est de la même manière que, je suis convaincue qu’on ne devrait plus confier des responsabilités administratives   à une personne à partir de 65 ans…

 Papa,

Ils ne savent pas qu’il n’existe aucune cure de jouvence pour le cerveau humain. C’est le seul organe moteur qui subit les effets du temps… Une personne âgée peut faire l’objet des abus de faiblesses comme cela a été ton cas.

 Les gens t’ont fait signer des documents alors que tu avais perdu la vue, que tu ne pouvais plus rester concentrer sur un dossier financier de 500 pages. 

 Le papi gâteau,

 J’ai dit à mes enfants de ne pas pleurer, car tu n’as jamais voulu faire souffrir quelqu’un.

 Tu as donné tout ce que tu avais. Tu pars sans rien laissé cacher dans un quelconque paradis.

Certes tu t’en vas au paradis, mais c’est pour préparer la chorale céleste qui accueillera d’autres illustres élus. 

 Dieu a effacé ta peine, le fils de Marie se tient à ta droite.  N’aie pas peur, avance vers la lumière. 

 Nous nous verrons bientôt.

 Je t ‘aime papa !


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Le consulat de France à Douala ferme ses portes à cause du Coronavirus

Gervais Mendo Ze

Le film des derniers instants du Pr Gervais Mendo Ze avant sa mort