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Un Avocat écrit à Longue Longue : « Cette autorité camerounaise qui retient ton passeport est passible de poursuites pour abus de pouvoir »

Longue Longue

L’affaire Longue Longue continue d’alimenter les commentaires sur les réseaux sociaux. Plusieurs camerounais expriment leur sentiment à l’égard de l’artiste. C’est le cas de Me Christian Bomo Ntimbane.


Longue Longue
Longue Longue – capture vidéo

En effet, l’Avocat camerounais au Barreau de Paris vient d’adresser une lettre à Longue Longue, dont Lebledparle a eu une copie sur les réseaux sociaux. Dans cette correspondance, le juriste estime que Longue Longue ne doit pas souffrir de son opinion dans un pays qui a la prétention démocratique. « Je t’écris pour te dire que tu n’as commis aucune faute sur le plan pénal pour accepter de subir toutes ces brutalités, violences morales et psychologiques. Tu as donné ton opinion sur le déroulement des élections présidentielles dans ton pays. J’ai réécouté ta déclaration, ce n’était qu’un point de vue. Tu as exprimé ta position comme beaucoup de personnes le font non seulement au Cameroun mais ailleurs. Tu n’as pas empêché l’exécution de la décision du conseil constitutionnel auquel cas on aurait pu parler de rébellion. Aucune loi camerounaise n’interdit à un citoyen de donner son point de vue sur les résultats d’une élection. Ce qui est interdit c’est d’empêcher ou de s’opposer à l’exécution de la décision du conseil constitutionnel. Car devenue définitive et sans recours. Par exemple, empêcher la prestation de serment de celui qui a été déclaré élu, sous peine de violer le caractère inattaquable de la décision de cette Cour », écrit Me Christian Bomo Ntimbane.

Le passeport de Longue Longue lui a été enlevé et l’Avocat stipule que c’est un abus d’autorité et présente les conditions dans lesquelles on peut retirer un passeport et celui qui a la compétence de le faire. « J’ai aussi appris que ton passeport t’aurait été retiré pour t’empêcher de faire une tournée au Canada. C’est un abus d’autorité. Le retrait du passeport est une mesure qui doit être prise par le juge pénal à l’issue d’un procès. Le procureur de la République ou le juge d’instruction peuvent aussi le faire, mais lorsqu’une procédure est ouverte », ajoute le juriste.

Et comme tel, il précise que l’autorité qui détient en ce moment son passeport peut faire l’objet des poursuites. « Cette autorité camerounaise qui retient ton passeport en ce moment, qui n’est ni juge, ni procureur est passible de poursuites pour abus de pouvoir », poursuit-il.

Me Christian Bomo Ntimbane invite l’artiste à porter plainte et qu’il va l’accompagner dans cette procédure. « N’aie pas peur, cher ami, dépose une plainte ou fait une citation directe contre cette ou ces autorités civiles ou militaires qui t’auraient bastonné à la machette ou qui auraient pris ton passeport. Je constituerai à mes frais un pool d’Avocats pour te défendre », suggère-t-il.

Depuis le retrait de son passeport, Longue Longue multiplie des actions en faveur d’un retour à la normale, c’est-à-dire que son passeport, lui soit restituer. Il demande pardon aux camerounais et aux autorités, pleure dans les vidéos et sur les plateaux de télévision, il multiplie les prières aux ancêtres et  à Marie.

Ci-dessous, l’intégralité de la lettre.

SI VOUS CONNAISSEZ LONGUE LONGUE OU SI POUVEZ LUI TRANSMETTRE CE COURRIER, FAITES-LE. JE NE SAIS PAS COMMENT L’AVOIR. JE SOUFFRE DE SA SITUATION ACTUELLE. PLEASE.

Mon cher ami LONGUE LONGUE,

Je suis Maître Christian NTIMBANE BOMO que tu connais bien depuis près de 25 ans à l’écho de Bonanjo où tu jouais souvent.

La dernière fois où nous nous sommes vus, il Y a quelques années, c’était au restaurant le coq noir à Paris lors de ta sortie de prison.

Je sais que tu m’as toujours porté en estime et tu n’as pas souvent manqué lors de tes spectacles auxquels j’avais assistés de me manifester publiquement ta reconnaissance pour le peu de soutien que j’ai pu t’apporter en tes débuts de carrière. Tu te rappelleras certainement que tu m’avais remis la maquette de ton premier album AYO Africa, espérant que je puisse le produire. Mais n’ayant aucune connaissance de l’industrie musicale, je n’ai pas pu le faire.

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Dans ces moments de détresse, je voudrais t’apporter toute ma compassion.

Encore très jeune tu m’avais fasciné par ton courage. A Echo de Bonanjo, à côté de l’hôtel Arcade à Douala où, tu prestais, était fréquenté essentiellement par des occidentaux parmi eux des diplomates français. Mais sans désemparer, alors qu’une telle entreprise pouvait entrainer la suspension de tes prestations, qui visiblement, irritaient ces bons clients occidentaux du cabaret, tu décriais devant eux, leur accaparation injuste de nos richesses naturelles.

En réalité, tu fais la musique dont l’Afrique a besoin. Tu allies talent et consistance. D’ailleurs, j’ai un ami qui prépare une thèse de Doctorat dans une grande université française sur tes thèmes musicaux. Il m’a promis te rencontrer bientôt.

Ceci dit, je t’écris pour te dire que tu n’as commis aucune faute sur le plan pénal pour accepter de subir toutes ces brutalités, violences morales et psychologiques. Tu as donné ton opinion sur le déroulement des élections présidentielles dans ton pays. J’ai réécouté ta déclaration, ce n’était qu’un point de vue. Tu as exprimé ta position comme beaucoup de personnes le font non seulement au Cameroun mais ailleurs. Tu n’as pas empêché l’exécution de la décision du conseil constitutionnel auquel cas on aurait pu parler de rébellion. Aucune loi camerounaise n’interdit à un citoyen de donner son point de vue sur les résultats d’une élection. Ce qui est interdit c’est d’empêcher ou de s’opposer à l’exécution de la décision du conseil constitutionnel. Car devenue définitive et sans recours. Par exemple, empêcher la prestation de serment de celui qui a été déclaré élu, sous peine de violer le caractère inattaquable de la décision de cette Cour.

Je répète, tu as donné ton point de vue. On appelle ça opinion. Et cette opinion n’engage que toi. C’est ta liberté d’opinion.

En France, il suffit d’aller sur You tube pour constater qu’il ya encore de nombreux français qui continuent de dire que Macron n’a pas gagné les élections présidentielles en 2017. Aux Etats-Unis après la prestation de serment de Donald Trump de millions d’américains ont arpenté les rues américaines pour dénoncer ce qu’ils considéraient comme la fraude électorale de Donald Trump. Jamais ces personnes n’ont vécu ce que tu vis. Jusqu’à nos jours de nombreux camerounais disent ouvertement que c’est Fru Ndi qui avait gagné l’élection présidentielle de 1992.

Tu as déclaré au cours d’une émission à la chaîne de télévision équinoxe dimanche dernier que tu avais été bastonné à la machette au Semil à Douala au point d’uriner du sang. Je n’arrive pas à croire que ce service dirigé par un ami ait pu poser un tel acte. Comment peut-on imaginer que cet officier formé à l’Ecole Navale Américaine, çàd dans une école où on a, entre autre pour devise de respecter et protéger la vie humaine, puisse admettre que tels traitements soient infligés à un citoyen dans son unité de commandement quel que soit ce qu’on lui reprocherait. Si tel est le cas, il y aurait bien à craindre que notre pays retombe sur des exécutions sommaires du temps des lois sur la subversion.

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J’ai aussi appris que ton passeport t’aurait été retiré pour t’empêcher de faire une tournée au Canada. C’est un abus d’autorité. Le retrait du passeport est une mesure qui doit être prise par le juge pénal à l’issue d’un procès. Le procureur de la République ou le juge d’instruction peuvent aussi le faire, mais lorsqu’une procédure est ouverte.

Cette autorité camerounaise qui retient ton passeport en ce moment, qui n’est ni juge, ni procureur est passible de poursuites pour abus de pouvoir.

N’aie pas peur, cher ami, dépose une plainte ou fait une citation directe contre cette ou ces autorités civiles ou militaires qui t’auraient bastonné à la machette ou qui auraient pris ton passeport. Je constituerai à mes frais un pool d’Avocats pour te défendre.

Il est suicidaire de ne rien faire en s’accommodant à de telles pratiques qui deviennent légion au Cameroun.

Les abus d’autorité ne doivent pas devenir la règle non écrite dans notre pays. Nous ne voulons pas d’un État qui terrorise.

Même si au final, nous ne gagnerons pas contre ces forts, parce que nous savons leur degré d’intimidation des autres corps de métiers de ‘État, nous aurons eu le mérite de n’avoir pas accepter l’instauration du système de pouvoir selon lequel, La raison du plus fort est toujours là meilleure. Nous refusons un État de justiciers où les sécurocrates dictent la loi et se substituent à la justice républicaine par l’instauration d’une justice noire qui se tient dans des salles d’interrogatoires et de tortures.

Tu n’as pas à te livrer en spectacle comme tu le fais en ce moment. N’accepte pas ces humiliations. Je comprends que les temps sont difficiles.

Il n’est aucune raison que les autorités non judiciaires s’arrogent le droit de punir les camerounais qui ne seraient pas d’accord avec leurs positions politiques.

Dans une république, l’administration est neutre. Elle ne doit pas être un instrument dont se sert le parti au pouvoir. Au parti au pouvoir. Que deviendra le Cameroun si chaque parti qui viendra au pouvoir s’approprie la puissance publique concédée à l’administration ?

Cher Longue Longue, ce n’est pas parce que tu n’approuves pas la politique du RDPC que l’administration camerounaise doit te sanctionner à cause de ton choix politique pour l’opposition. N’accepte pas de t’excuser auprès de tes tortionnaires car ce sont eux qui ont violé la loi en te faisant subir tous ces humiliations et sévices.

Dernièrement en te voyant à genoux face à Djene Djento qui se déclare être un militant du RDPC, j’ai compris que tes choix politiques sont très mal acceptés par l’élite RDPC de ta communauté qui a décidé de te faire changer d’avis.

Prophétiquement tu t’es fait appeler le LIBERATEUR;

Oui, comme tout libérateur, tu seras persécuté. N’aie pas peur de la mort, car aucun homme fût-il puissant ne peut te donner la mort si Dieu ne l’a accepté.

Ne renonce pas à ta mission de dénonciateur du mal que tu t’es donné. Face à la pression, n’accepte pas de dire que le mal est devenu le bien pour donner bonne conscience à ceux qui font du mal. Sois juste dans tes prises de position. Car un libérateur est d’abord un homme juste.

Je te remets entre les mains du Seigneur. Tu es dans mes prières.

Dans la paix, cher Longue Longue.


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