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Récit d’une déplacée anglophone : «Parfois je couche avec dix hommes et la plupart refuse la protection»

Captureprostitueeanglo

Le programme Grand Reportage sur RFI a fait un grand zoom sur la crise anglophone au Cameroun. Ainsi, le média français a octroyé la parole à une refugiée vivant à Douala. Au cours d’un témoignage saupoudré de tristesse et de dégoût, la jeune femme affirme être contrainte à la prostitution parfois gratuite et risquée pour pouvoir survivre.


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Prostituée au Cameroun – photo d’illustration

Depuis trois ans, les régions anglophones du Cameroun sont le théâtre d’un conflit meurtrier qui oppose l’armée camerounaise à des séparatistes, issus de la minorité anglophone du pays, et qui s’estiment marginalisés par le pouvoir central. Une guerre sans précédent, qui selon l’ONU a déjà causé plus de 3 000 morts et 700 000 déplacés.

« Me prostituer, c’était la seule solution pour survivre »

A Bonabéri, quartier de la banlieue Ouest de Douala, des dizaines de milliers de déplacés se sont entassés. Parmi eux, Jane une jeune femme dont la force des évènements a conduit à vendre son corps contre de l’argent. Elle a accepté de parler discrètement à RFI à l’arrière d’une maison, jouxtant une cour d’école. Jane, 40 ans, se prostitue depuis un an et demi, dans un faubourg de la ville de Douala où elle s’est déplacée pour fuir le conflit qui meurtri les régions anglophones. « Je n’ai aucune famille ici. Aucune ressource. On m’a fait comprendre que me prostituer, c’était la seule solution pour survivre ». A son arrivée à Douala, Jane a d’abord passé trois nuits dehors, à la gare de bus, avec ses deux enfants. C’est une femme rencontrée par hasard, qui l’a introduite dans le réseau. « Parfois je couche avec dix hommes en une seule nuit. Et la plupart refusent que je me protège. Ça me fait peur mais je n’ai pas le choix. Ce sont eux qui payent. Ils posent leurs conditions. Il me faut acheter de quoi manger », déclare-t-elle en termes anglais, traduits dans la langue de molière par la radio française.   

Avec l’argent gagné, Jane a pu payer à ses enfants le bus, pour les envoyer vivre chez un oncle éloigné. Mais certaines nuits, elle gagne à peine de quoi manger. « Beaucoup de clients refusent de nous payer car ils savent qu’en tant que déplacés venus des régions anglophones, nous n’avons personne pour nous défendre », raconte Jane, parfois obligée dit-elle de supplier son dernier client de la nuit, pour qu’il lui donne ne serait-ce que de quoi se payer le taxi pour rentrer.

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Le jour où tout a commencé

Dans son village, Jane vivait avec sa mère. Elle gagnait sa vie en vendant des légumes. Elle raconte avoir fui en pleine nuit, après qu’un groupe d’hommes armés et en uniforme est entré chez elle par effraction avant de la violer. « Ils m’ont d’abord frappée au visage. J’ai saigné. Mes dents commençaient à bouger. Puis ils ont tiré sur ma mère devant moi. Elle était blessée à la jambe. Ensuite ils m’ont demandé de faire venir ma fille, je les ai suppliés de ne rien lui faire. Onze ans c’est trop jeune. Puis ils m’ont fait enlever ma robe. » Plusieurs fois, au cours de son récit, pudique, Jane peine à retenir ses larmes. Sa mère a succombé à ses blessures depuis », a relaté la refugiée dans la suite de cette grosse production journalistique.

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Jane n’est pas un cas isolé. Comme elle, de milliers de ressortissants du NOSO ouest croupissent dans la misère dans les différents lieux où ils ont élu domicile. D’après l’ONG Norvegian Refugee Council paru l’an dernier, les régions anglophones du Cameroun connaissent la crise de déplacement la plus «négligée au monde».


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