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[Tribune] les Etats-Unis parlent à toutes les sociétés. Mais quel est le message ?

Makon R

Depuis l’envahissement du Congrès américain par une horde de chenapans, nous entendons les analyses de toutes sortes, légitimes cela va s’en dire, sur la fin de la prétendue exemplarité du modèle démocratique américain, qui a eu, des siècles durant, le culot de s’eriger en référence absolue.


Makon R
Richard Makon – capture photo

Même les dictatures les plus sauvages d’Orient et du Sud, emmûrées dans une barbarie continue et des réflexes liberticides des siècles passés, qui ont constitué progressivement leurs territoires en prisons à ciel ouvert, s’embourbent dans des réflexions saugrenues visant à légitimer leur autocratie foncière et primitive.

Et on entend alors dire: voilà donc la démocratie américaine qu’on nous a tant vanté ! Regardez alors se déliter le système politique américain qui donne à tous des leçons à tout va !

Et comme une symphonie macabre, mêmes les gouvernements foncièrement autocratiques, devenus depuis longtemps sourds aux cris de douleurs de leurs peuples, s’égaillent et s’empressent de dire: les Etats-Unis nous parlent !

Et si l’on admet effectivement que les événements qui ont marqué les séquences électorales et post-électorales américaines délivrent un message à toutes les sociétés politiques du monde, la question que l’on pourrait se poser est celle de savoir, quel peut en être la teneur ?

À mon humble avis, le message de cette parenthèse historique est simple, et peut être décliné dans les quelques considérations suivantes :

1- la démocratie (idée, idéal, projet et pratique, tant dans son sens formel que substantiel) reste et demeure une œuvre humaine imparfaite, c’est-à-dire en permanente construction, en constant mûrissement, et son expérimentation par une société peut connaître tant des avancées que des reculades, mais jamais des renoncements !

2- il n’y a pas de modèle abouti, ni de référence absolue de démocratie, juste des expérimentations situées qui s’en rapprochent le plus ou s’en éloignent foncièrement.

Il n’y a que des expériences nationales, fondamentalement et ontologiquement inscrites dans des contextes historiques, anthropologiques, sociologiques, politiques, économiques et socioculturels différents, donnant par ces faits même une coloration singulière à toute expérience démocratique.

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3- il n’y a cependant aucune confusion possible entre une société démocratique et une société non-démocratique, car il existe ce qu’un célèbre juriste, sous nos cieux, à nommé un « jus cogens démocratique », constitué de principes fondamentaux et intangibles, et de normes impératives qui construisent tant l’ossature que la substance et la pratique de la démocratie.

Parmi ces principes on peut retenir, entre autres:

– Le pluralisme politique, économique, social et culturel,

– L’existence d’élections régulières et démocratiques, c’est-à-dire libres, ouvertes, transparentes, justes et équitables,

– L’existence d’une justice indépendante (judiciaire, administrative et constitutionnelle), garantissant l’isonomie (égalité devant la loi) et l’isocratie (égalité devant le pouvoir politique) des citoyens,

– La séparation des pouvoirs, le respect des droits de l’homme et la protection des libertés fondamentales,

– L’état de droit et la bonne gouvernance de l’en-commun.

4- La démocratie se fonde, se réalise et se développe grâce à quatre (04) éléments fondamentaux :

– la qualité et la solidité des institutions républicaines,

– la qualité et la force du leadership des acteurs politiques,

– la robustesse des systèmes de gouvernance,

– le niveau de maturité politique des peuples.

Sur la base de ces considérations liminaires, la société américaine est effectivement démocratique, et on ne peut la comparer, ni de près ni de loin, avec la plupart des systèmes et régimes politiques d’Europe de l’Est, d’Asie, d’Orient et d’Afrique, qui sont, pour l’essentiel, des dictatures, et au meilleur des cas, des « démocratures ».

Et pour en administrer la preuve cinglante, c’est que quel que soit l’amplitude des errements individuels observés, d’une part on peut noter qu’un leadership politique nouveau pointe déjà à l’horizon assurant du renouvellement du personnel politique américain, et d’autre part que les institutions américaines résistent malgré les profanations subies, garantissant la poursuite sans discontinuer du processus d’investiture de Joe BIDEN, qui dormira dans tous les cas à la Maison blanche le 20 janvier prochain et pour les quatre ans à venir !

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C’est ça même la force d’une démocratie, qui n’a pas vocation à être une antichambre du paradis.

Les errements de ces derniers mois démontrent simplement de l’impératif de la poursuite de l’entreprise d’amélioration et de perfectionnement tant de la philosophie, du  régime que du système démocratiques, qui doivent toujours s’articuler et se réaliser, quelles que soient les sociétés considérées, dans l’intérêt suprême des peuples pour lesquels la démocratie est instituée, institutionnalisée et expérimentée.

Les gouvernements américains successifs, de droite comme de gauche, embrigardés par les forces de l’argent, ont oublié, voilà des décennies maintenant, les couches les plus pauvres et les plus vulnérables, celles-là même qui ont le plus besoin de magistrature d’arbitrage et de justice de l’Etat. Ils le payent tous aujourd’hui !!!

Les sociétés africaines ne doivent pas voire dans cette parenthèse une sorte de légitimation de leurs errements politiques, mais plutôt tirer les leçons qui s’imposent pour :

– premièrement, construire des systèmes institutionnels mieux adaptés à nos réalités,

– deuxièmement, favoriser une ingénierie de solutions politiques, normatives, économiques, sociales et culturelles exprimant le mieux notre identité,

– troisièmement, susciter un leadership visionnaire, révolutionnaire et de service, faisant primer au-dessus de tout, l’épanouissement des hommes, le progrès des sociétés, l’essor et la préservation de notre civilisation millénaire.

 


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