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[Tribune] Le rôle des influenceurs africains dans la dépravation des mœurs et le délitement du modèle traditionnel de réussite sociale.

Influenceurs web can

Caroline Meva, écrivaine propose dans une réflexion publiée sur Facebook, le lundi 31 janvier 2022 sur le phénomène d’influenceurs web qui est avec l’avènement des réseaux sociaux. D’après elle, « le phénomène de la web influence traîne parfois derrière lui une réputation sulfureuse, l’objectif pour bon nombre d’influenceurs(ses) étant de devenir célèbres, de faire le « buzz » par tous les moyens, y compris les plus sordides ».

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Les influenceurs web et le ministre des sports et de l’éducation physique – DR

Lebledparle.com vous propose le texte intégral.

 Le mot « influenceur »,  selon le dictionnaire Larousse, désigne :  » une personne qui, par sa position médiatique, a un grand pouvoir d’influence sur l’opinion publique, voire sur les décideurs ». Parmi les influenceurs(ses) sur Internet et les réseaux sociaux, on trouve des personnes célèbres et celles qui sont suivies par un grand nombre d’abonnés dans divers secteurs d’activité. Les influenceurs(ses) de seconde zone sont les plus nombreux et dans cette catégorie, point n’est besoin d’un quelconque niveau d’études, de formation professionnelle, de diplômes, ni d’intelligence ou de sagesse. Il n’y a non plus aucune ligne éditoriale, aucun thème précis, on divague au gré des préoccupations du moment, on parle de tout et de rien, de la pluie et du beau temps. N’importe quel individu sachant s’exprimer, même approximativement en français ou en anglais, qui a du bagou, de l’assurance et le sens de la répartie, se déclare influenceur(se). Ces influenceurs(ses) de seconde zone constituent le « tout-venant », la lie de la profession, qui livrent quotidiennement un spectacle lamentable aux internautes ; des clashes permanents entre eux, dans lesquels les arguments volent bas, au-dessous de la ceinture, ils vocifèrent, lancent des invectives, des noms d’oiseaux, colportent des ragots, débitent des insanités à longueur de journée. 

 Le phénomène de la web influence traîne parfois derrière lui une réputation sulfureuse, l’objectif pour bon nombre d’influenceurs(ses) étant de devenir célèbres, de faire le « buzz » par tous les moyens, y compris les plus sordides. Ils sont obnubilés par le désir de récolter le plus grand nombre de « likes », d’émoticones de cœurs, d’applaudissements virtuels. Pour cette fin, ils publient quasi-quotidiennement des « posts », des photos, des audios, des vidéos, des « stories ». Ils soignent les apparences, montrent sur la Toile une image surfaite et sublimée d’eux-mêmes, très souvent éloignée de la réalité. Ils surfent sur la vague des fantasmes populaires, notamment la richesse, la jeunesse, la beauté physique, la réussite matérielle. Ils veulent se faire passer pour des privilégiés en brandissant ostensiblement des signes extérieurs d’opulence, à savoir des vêtements, accessoires, bijoux de marque hors de prix ; ils prétendent rouler carrosse, boire du champagne et des bons vins millésimés. L’argent, les biens matériels sont mis en exergue ici, mais nul ne se soucie de la manière dont ils sont gagnés. Qu’ils soient le fruit de détournements de deniers publics, de la corruption et autres malversations, de la prostitution, du grand banditisme ou feymania, cela ne pose aucun problème car, pour la majeure partie des citoyens, l’argent n’a plus d’odeur. 

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 C’est connu, l’exploitation du sordide, des déviances et de la perversité est courante et payante, alors certains influenceurs s’en donnent à cœur joie en jouant sur la trivialité. Ils font assaut de tenues et d’attitudes suggestives, se trémoussent lascivement devant leurs abonnés, le geste et le regard aguicheurs. Ils exhibent leur corps partiellement dénudé, montrent leur torse, leurs biceps, pectoraux, tablettes de chocolat pour les hommes, et pour les femmes leurs seins, leurs cuisses, leur « bosse » ou popotin, etc. La nudité et le corps féminin font vendre, l’entreprise de la publicité l’a compris en l’exploitant à tout va, promouvant ainsi la chosification de la femme et portant atteinte à sa dignité en la traitant comme un vulgaire objet commercial. La célèbre influenceuse ivoirienne Eudoxie Yao aux formes généreuses a déclaré sans ambages, selon Abidjan Show  : « j’expose mon corps parce qu’il me fait gagner de l’argent. c’est mon corps qui m’a rendue célèbre ». C’est tout dire ! Ce constat pose d’emblée la question de l’évolution de la notion de « modèle de réussite social ».

 Le modèle classique de réussite sociale, qui est menacé d’obsolescence et de disparition aujourd’hui est fondé sur un certain nombre de normes et de valeurs, à savoir l’honnêteté, la probité, le respect, la patience, la résilience, le sens de l’effort, le mérite et le travail bien fait. Il faut passer de longues années d’études pour obtenir un diplôme ou pour une formation professionnelle, afin de devenir médecin, ingénieur, avocat, enseignant, etc. Aujourd’hui pour être riche et célèbre, il suffit de savoir pianoter sur un ordinateur, s’afficher dans une vidéo ou un spot publicitaire de quelques secondes ou minutes, se dénuder, parader à longueur de journée sur les réseaux sociaux et récolter en une seule prestation des sommes faramineuses dix, cent fois plus élevées que celles que gagne en 20 ans de service un médecin qui, par ailleurs, a fait 10 ans d’études, plus une spécialisation. C’est le fondement même de la notion de « réussite sociale » qui est remis en question. Nous sommes là face à l’émergence d’un nouveau type de société et d’une nouvelle échelle des valeurs qui plongent dans le désarroi aujourd’hui les parents, ainsi que les institutions chargées de l’éducation et de la formation de la jeunesse.

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 Le modèles de réussite sociale qui prend de l’ampleur de nos jours et qui est propagé par Internet et les réseaux sociaux fait la part belle à la vénalité, à la futilité, à la superficialité, à la dépravation des mœurs, à la facilité, aux apparences.  On peut être un malfrat, un pervers, une personne de petite vertu, mais être porté aux nues, avoir pignon sur rue, uniquement parce qu’on est célèbre sur les réseaux sociaux, qu’on a de l’argent et des biens matériels. Malheureusement on relève que là où le matériel prend le pas, l’humain recule et disparaît ; ce nouveau modèle de réussite sociale fondé sur l’exaltation de l’avoir au détriment de l’être conduit inévitablement à la déshumanisation, à la chosification de l’humain, à la désorganisation et à la décadence d’une société privée de repères, sans valeurs, sans foi ni loi.

 Internet et les réseaux sociaux se présentent ainsi comme une jungle où se côtoient le meilleur et le pire, les informations utiles et éducatives, comme les futiles et nocives. Il apparaît donc indispensable, voire vital pour l’internaute, de faire preuve d’esprit critique, de sagesse et de discernement afin de séparer le bon grain de l’ivraie, de promouvoir l’utile et combattre le futile. Il appartient aux leaders d’opinion, aux têtes de proue de ce phénomène d’influenceur de remettre l’homme au centre des préoccupations de tous en contribuant à la redéfinition, à la préservation des normes et des valeurs sociales. De même, les ONG, les pouvoirs publics chargés des affaires sociales, de la femme et de la famille, de la formation professionnelle et de l’éducation des masses, sont interpellés afin d’intensifier, non seulement la coercition, mais aussi leurs actions de sensibilisation et d’éducation aux valeurs humaines fondamentales, dans le secteur des influenceurs(ses) sur Internet et les réseaux sociaux.


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