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Dieudonné Essomba : « L’État n’a plus les ressources pour entretenir les infrastructures construites il y a quarante ans »

esso dieudone donne

La ville de Yaoundé est en grande partie sans électricité depuis le 7 aout 2019. Cette situation qui impacte sérieusement sur l’économie du pays suscite des réactions chez les leaders d’opinion.

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Dieudonné Essomba (c) Droits réservés

C’est le cas de l’économiste camerounais, Dieudonné Essomba. Dans une tribune libre publiée sur sa page Facebook en date du 13 aout 2019, le consultant de l’émission Club d’élite sur la chaine de télévision privée Vision4, n’est pas allé du dos de la cuillère pour voir en ces délestages, « la fin d’un régime qui ne contrôle plus rien ».

Connu pour son inclination pour le fédéralisme, l’économiste estime que « l’État du Cameroun n’a pas les moyens de remonter la pente glissante sur laquelle le pays est engagé »

Lebledparle.com vous invite à lire dans son intégralité, la tribune de Dieudonné Essomba.

L’OBSCURITÉ A YAOUNDÉ : SYMPTÔME D’UN SYSTÈME OBSOLESCENT

On sait bien ce que le Gouvernement voudrait entendre, à savoir qu’il fait des efforts remarquables qui conduisent le Cameroun à bon port. Il veut qu’on approuve son modèle de gestion, et tout au plus est-il prêt d’accepter quelques critiques de forme.

Il se trouve malheureusement qu’il a tort. Et le lui dire ne signifie pas qu’on est contre lui ou qu’on lui demande de partir.

C’est lui dire tout simplement la vérité, afin qu’il agisse en conséquence.

La situation dans laquelle se trouve le Cameroun ne peut plus s’améliorer en restant dans le même système. Ce n’est pas possible.

Que l’obscurité règne dans la ville de Yaoundé pendant des semaines ne peut pas être anecdotique : on a beau se rassurer à travers des explications ad hoc comme on le fait d’habitude, il n’empêche : cela traduit une profonde déplétion d’un système épuisé, qui n’est plus capable de répondre à des exigences minimales.

L’État du Cameroun est en effet au bout du rouleau : ayant pris sur lui la titanesque tâche de « fabriquer » la Nation camerounaise et de développer les Camerounais sans les Camerounais, à travers la confiscation des 4 500 Milliards de la Nation, il se retrouve débordé de toutes parts, harcelé, écrasé par une demande sociale qui s’amplifie à une vitesse exponentielle.

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Son « unité nationale » administrative s’écroule en larges pans entiers, rongée par le tribalisme politique et soumis aux coups de boutoir de la Sécession anglophone qui épuise ses maigres ressources.

Sur le plan économique, l’État n’a même plus les ressources pour entretenir les infrastructures construites il y a quarante ans ! La route Yaoundé-Bafoussam ou/et Ngaoundéré-Kousseri sont devenues de véritables mouroirs.

N’en parlons plus des autres routes qui se dégradent partout dans la République, le réseau électrique obsolescent, les salles de classe en hutte cohabitant avec des écoles délabrées, les centres de santé sans plateau technique, etc.

Les infrastructures engagées en 2010 dans un enthousiasme délirant comme l’autoroute Yaoundé-Douala sont complètement à l’arrêt, voire à l’abandon.

La Coupe d’Afrique des Nations menace de « glisser » une fois de plus, à la grande honte du pays. Et à la vérité, peu de gens croient à la capacité du Cameron d’organiser cet événement en 2021.

Bien plus, la croissance qu’on ne cesse de brandir pour faire illusion n’est qu’une argutie statistique, car une véritable croissance se calcule à « balance courante équilibrée ».

Si vous avez une croissance alors que votre balance commerciale se déséquilibre davantage, cela signifie que vous améliorez votre niveau de vie en prenant les biens des autres sans payer. C’est cela que font les malhonnêtes au quartier : ils vivent bien, mais sans payer le loyer et sans régler leurs factures dans les bars…

Et c’est bien ce que fait le Cameroun, avec une balance commerciale qui explose alors qu’on parle de croissance !

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On a expliqué et réexpliqué au régime de Biya de segmenter l’État en un État central et des États régionaux ou fédérés de manière à alléger leur mission et mieux s’acquitter de leurs tâches, ils s’arcboutent dans leur modèle manifestement périmé qui prend l’eau de toutes parts.

Je n’ai jamais compris cet incroyable entêtement du Gouvernement de porter sur son dos la misère de tout le Cameroun ! Quel masochique plaisir des gens normaux peuvent ressentir à être accusés de tous les échecs du pays, à être maudits dans toutes les chaumières du Cameroun, juste pour le plaisir malsain de manipuler l’argent de la Nation ?

Dans la configuration actuelle, l’État du Cameroun n’a pas les moyens de remonter la pente glissante sur laquelle le pays est engagé.

Ni les rencontres successives des ministres, ni les appels aux partenaires extérieurs, ni l’endettement, rien de tout cela ne peut plus sauver le Cameroun.

Il faut entreprendre de vraies réformes, il faut segmenter l’État et délester le pouvoir central de tous ces millions d’attributions que le Gouvernement croit participer de sa puissance, mais qui l’affaiblissent plutôt et très grièvement.

Messieurs les Membres de gouvernement, prenez la moitié des ressources budgétaires avec quelques missions stratégiques, et remettez l’autre moitié aux États régionaux ! Ils vont mieux se débrouiller que vous et vous n’aurez plus à subir ce harcèlement permanent, ces quolibets, de mépris profond qui monte contre vous !

Et il faut le faire le plus tôt possible, car chaque minute qu’on passe en atermoiements ne fait qu’aggraver les rigidités d’un système qui ne peut plus marcher.

Dieudonné ESSOMBA


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