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Le crocodile du Botswanga : récit d’une histoire cachée aux origines françafrique ! (1960-2010)

Bostwanga

Tu avais cru qu’ils étaient là pour faire le théâtre ? Au-delà du rire et du spectacle, le crocodile du Botswanga est plutôt un cours magistral sur l’histoire de l’Afrique. Plusieurs sont tombés comme du n’importe quoi devant cette feinte, en vivant certaines scènes sans avoir eu le temps ou la présence d’esprit de les coller aux réalités historiques de l’Afrique.

Bostwanga
Capture écran du film le crocodile du Bostwanga

L’histoire se déroule là, dans un pays imaginaire nommé Botswanga, qui se situerait entre le Maghreb et l’Afrique du Sud. C’est en jet privé que Leslie Konda et son agent foulent le tapis rouge de ce pays pauvre et endetté, et méconnu de la pute marocaine. Ils sont reçus par un hymne dont monsieur Didier se moque et Bobo l’a remarqué. En fait, cet hymne ressemble note par note à une célèbre chanson de Jacques Brel. En réalité, plusieurs hymnes africains sont l’œuvre de musiciens français, tant sur la musique que sur les paroles ; exemples du Sénégal, la RCA, le Tchad…

Bienvenue au Botswanga, l’effigie du dictateur encombre les rues. Et le slogan un seul peuple, un seul État, un seul chef, rappelle tout de suite le « Ein volk, ein Reich, ein Führer » de Hitler, ayant inspiré la majorité des régimes totalitaires africains. Il ne faudra pas attendre de visiter les lieux pour comprendre l’amour de Bobo pour Hitler, comme celui de Bokassa pour Napoléon. Oublions son ignorance sur l’identité de ses enfants ; qu’il a fait ses classes militaires en Bavière, (comme d’autres à Saint Sire), mais incapable de viser sa proie a proximité malgré la possession d’un AK47. Arrêtons nous devant sa famille préférée, ses crocodiles, rappelant amusément celle des crocodiles de Yamoussoukro, du Vieux Félix Houphouët, qu’il aimait nourrir lui-même ; peut-être pas avec de l’opposant politique, comme Idi Amin Dada qui aimait boire le sang et manger la chair de ses victimes. Arrêtons nous sur les noms des crocodiles de Bobo : Jean Marie, Marine, Marion, se référant à la famille Le Pen, du père à la petite fille, réputée pour leur haine raciale.

Le film qui tourne autour du football ou du footballeur n’est pas anodin. On se rappelle l’amour d’intérêt qu’avait Mobutu pour le foot. Il avait tout misé sur ce sport pour sa propagande politique, car il connaissait lui aussi son importance « pour l’image d’une nation ». Comme le stade Bobo 1er, plusieurs dictateurs africains avaient des stades en leurs noms : Stade Ahmadou Ahidjo…ils étaient prêts à miser des milliards pour distraire le peuple, que d’investir dans l’éducation et la santé, et la construction d’une nation unifiée. Voilà pourquoi au Botswanga comme ailleurs, on se retrouve avec des citoyens illettrés, qui n’ont d’autres voies que de joindre les rang des rebelles, toujours au Nord, contestant au moyen des mutineries à répétions le pouvoir en place. l’inculture de Bobo, son incapacité à soutenir un discours cohérent, rappelle l’éducation de phacochère de Amin Dada, l’ineptie de Bokassa dont a malheureusement hérité les centrafricains.

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Bobo quitte rarement son treillis kaki, on aurait aimé que ce soit un clin d’œil à Sankara, hélas. Il nous rappelle en même temps qu’au 21e siècle en Afrique, on accède encore au pouvoir par la force des armes. Son élan à tutoyer le blanc, et à humilier ses ministres en public, nous fait penser à Dadis Camara. Et son aide de camp, lieutenant Yaya, toujours si près, n’est que la copie de Sékouta Konaté : mais aussi celle de Mobutu, Compaoré, Bozizé, Kabila…ces « fidèles », faisant office de « marionnettes », mais qui vont finir par retourner la veste et a renverser le boss.

Parlons de la première dame, copie parfaite de l’extravagante Chantal Biya. Promotrice d’une fictive et fantaisiste association, avec pour siège national Genève, en Suisse, deuxième patrie du couple présidentiel. Bobo rappelle à sa femme qu’il a déjà nommé son frère ministre des sports, ce qui nous fait penser à ce même ministre camerounais familier à la première dame. Elle qui n’hésite pas à se défouler sur des musiques populaires dont elle semble si bien maitriser les pas. Le nom Babimbi que porte Bobo, fait référence au village bassa, et à l’Angolais Savimbi.

N’oublions pas Taucard, homonyme de Jacques Foccart, monsieur Afrique de la Ve République, cerveau de toutes les opérations françafrique depuis les indépendances. Il est le représentant de Tot-elf, une addition de Total et de Elf, ces entreprises d’extractions françaises, qui ont été la source des financements occultes de la métropole, des dictatures africaines, des coups d’Etat et des guerres, du Gabon, au Biafra, passant par la RCA. Omar Bongo en était le savant représentant ; et le virage vers un nouveau partenariat avec la Chine comme le rappelle Bobo à Taucard serait né avec le courage de Bongo Fils. Même comme la Chine, serait elle aussi un « colonisateur » qui ne dit pas son nom, peut-être même plus vicieux.

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Mais ce qui intrigue, c’est la peur de Bobo qui soupçonne son fils de 5 ans de préparer un coup d’Etat. Dans un contexte animé par la fierté des chefs présidents africains de transmettre le pouvoir à leur fils comme dans un royaume. Plusieurs se proclament président à vie comme ce fût le cas de l’empereur Bokassa, ils veulent mourir au pouvoir, et même gouverner durant leur mort. Comme avec Mobutu, on entend toujours des louangeurs psalmodier : « vive notre chef ». C’est la même scène d’un discours de Mobutu du 24 avril 1990, où il fait couler une larme de « crocodile », que Bobo a reprise avec brio dans le film: comprenez son émotion.

L’autre fait intriguant serait cette propension de certains chefs d’Etats, comme Mobutu depuis 1970, Mugabé, à Botswanguiser leur nation, en inventant des solutions africaines pour des problèmes africains. Comme Bobo, Yahya Jammeh président Gambien, prétendait guérir le sida, et avait juré égorger tous ceux qui crieraient « vive le mariage homosexuel », même s’ils sont contre l’adoption. La chute est historique, et interpellatrice, comme on vient au pouvoir c’est ainsi qu’on le quitte.

© Félix Mbetbo, monsieurbuzz.over-blog.com

 

 


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