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Crise anglophone-Jean-Pierre Bekolo : « Les années Biya ont fait des Camerounais un peuple qui meurt en silence »

le cineaste camerounais jean pierre bekolo

Dans un entretien publié dans le site lemonde.fr, le cinéaste camerounais, Jean-Pierre Bekolo  indexe le président de la république et son régime à propos de la crise anglophone qui divise et hante le Cameroun en ce moment.


le cineaste camerounais jean pierre bekolo
Jean-Pierre Bekolo – DR

A la question à double volet de savoir D’où vient cette crise qui divise et hante le Cameroun. Pourquoi le gouvernement fait-il blocage aux revendications des anglophones ? Selon l’auteur du célèbre film Quartier Mozart, sorti en 1995, « Pour comprendre la crise, il faut se replonger dans l’histoire de ce pays « créé » par les Allemands à la fin du XIXe siècle. La défaite allemande lors du premier conflit mondial a fait du Cameroun un butin de guerre que les Français et les Anglais se sont partagé. La crise anglophone actuelle démontre à quel point nous, les francophones du Cameroun, avons intégré le modèle colonial français et avons développé une psychologie de vaincus après une guerre de libération nationale que nous avons perdue à la fin des années 1960 ».

Pour le deuxième volet de la question, l’ancien employé de la CRTV, affirme que : « Le régime francophone a pris les armes de l’oppresseur français pour s’en servir contre les anglophones parce qu’ils ont osé remettre en question un modèle qui les a « francophonisés ». C’est une guerre étrange qui a des fondements psychiques profonds ». « La crise anglophone et la francophonie du président Paul Biya, qui cumule quarante et une années au pouvoir, sont le résultat de ce long processus historique. Cette histoire désastreuse ne pouvait laisser que des souffrances chez les anglophones », ajoute-t-il.

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Abdourahman Waberi, chroniqueur à lemonde.fr, fait un constat selon lequel, au-delà de la crise anglophone, c’est tout le pays semble être un bateau ivre depuis des décennies. Jean-Pierre Bekolo  déclare que : « Dans ma génération, les parents nous avaient toujours interdit de nous intéresser à la politique. Eux étaient trop occupés à savourer l’espoir des indépendances, non sans avoir la peur au ventre, car la répression n’avait pas disparu, loin de là ».

« En tant qu’artiste, je me considère comme un radiologue de la société. Les années Biya ont fait des Camerounais un peuple porc-épic. Comme l’animal, les gens meurent en silence. Imaginez que, dans notre pays bilingue, des Camerounais reprochent tous les jours à d’autres Camerounais d’oser crier leur mal-être parce que leur identité anglophone n’est pas respectée », poursuit-il. « L’heure n’est plus au bilan, elle est à l’organisation d’une transition démocratique. On ne peut plus attendre je ne sais quel messie pour faire ce travail à notre place », renchérit-il.

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Toujours concernant la crise sociopolitique actuellement en cours au pays, une question lui a été posée, celle de savoir qu’elle est sa contribution ? « Elle passe par plusieurs canaux. Je parle à mes concitoyens, j’écris des articles, je tiens un blog et je fais des films, parfois sur des sujets brûlants », répond-t-il. Bien plus, le cinéaste met l’accent sur son dernier film Le Président. Comment sait-on qu’il est temps de partir ? (2013), tout en soulignant que ce n’est pas un portrait du président Biya. « C’est tout simplement une manière d’introduire la question de la fin de règne que les Camerounais, lui compris, n’osent pas aborder. Nous devons tirer les leçons de la fin désastreuse des longs règnes de Mobutu au Congo et de Houphouët en Côte d’Ivoire, pour ne citer qu’eux », conclue-t-il.


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