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Interview : Mathias Eric Owona Nguini analyse la décentralisation, le fédéralisme et la régionalisation

MATHIAS ERIC OWONA NGUINI 7 MINUTES POUR CONVAINCRE AFRIK INFORM

L’universitaire parle des différences et des similitudes des formes d’Etat, comme le fédéralisme, le régionalisme et la décentralisation, de ce que cela coûte et des compétences des collectivités territoriales décentralisées dans la mise en œuvre et le fonctionnement de ces systèmes de gouvernement.


MATHIAS ERIC OWONA NGUINI 7 MINUTES POUR CONVAINCRE AFRIK INFORM
Mathias Eric Owona Nguini – DR

Est-ce que vous pouvez faire la différence entre les différentes formes de gouvernement que proposent les acteurs politiques notamment, la décentralisation, le fédéralisme et la régionalisation ?

Il y a ce qu’on appelle l’Etat simple. L’Etat simple c’est ce qu’on appelle l’Etat Unitaire. 11 y a l’Etat complexe et l’Etat fédéral. Entre l’Etat unitaire et l’Etat fédéral, il y a des variations : ça veut dire qu’il y a l’Etat unitaire centralisé qui est la forme la plus simple, et l’Etat unitaire décentralisé qui est une forme qui commence à se complexifier.

Et ensuite il y a l’Etat régional qui est un Etat unitaire fortement décentralisé parce que dans ces Etats-là, les régions ont un niveau important d’autonomie. Puis, il y a maintenant le fédéralisme qui est complexe et il y a ce qu’on appelle le fédéralisme homogène et le fédéralisme hétérogène. Voilà pour les formes de l’Etat.

Le fédéralisme et l’Etat unitaire sont essentiellement caractérisés par leurs différences. Parce que la structure n’est pas la même, mais il existe une structure intermédiaire avec ce qu’on appelle l’Etat régional et dans certains cas l’Etat autonome comme en Espagne ou il y a beaucoup de régions autonomes qui ont un statut spécial.

Pour ce qui concerne les différences, il y a celles qui ont trait à la structure et au fonctionnement. Dans le modèle de l’Etat unitaire, l’Etat central conserve un contrôle qui est très important. Il exerce des rapports de tutelle sur les unités décentralisées et exerce aussi dans une certaine mesure des rapports hiérarchiques alors que dans l’Etat fédéral, un certain nombre de compétences sont strictement reversées par l’Etat fédéré.

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On constate à la lumière de vos explications que tout cela à un coût. Est-ce que les collectivités territoriales sont assez outillées et préparées pour se prendre en charge elles-mêmes suivant la forme de gouvernement qu’on va adopter ?

En ce qui concerne le cout, l’Etat qui est à priori le moins coûteux c’est l’Etat unitaire. L’Etat unitaire décentralisé commence à comporter un certain coût. Et puis, le fédéralisme est coûteux parce que la structure étatique est complexe ; ça veut dire par exemple que si on a un Etat fédéral avec deux Etats fédérés, ça fait au final trois Etats. Maintenant il n’y a pas en soi une formé qui est meilleure que l’autre, ça dépend des conditions du pays dans lesquelles on applique le système institutionnel.

Pour le Cameroun, le fédéralisme, si on l’applique actuellement, va poser plusieurs problèmes parce qu’il faudra d’abord savoir quel type de fédéralisme on va appliquer. Il est évident, compte tenu de la construction complexe du pays, qu’il y a plusieurs segments sociaux en termes de biens, en termes ethno-régionaux et confessionnels, que le fédéralisme territorial peut être difficile à appliquer.

Si on choisit plutôt un fédéralisme identitaire ou communautaire défini autour des grandes constellations ethniques et ethno-régionales, ça va poser des problèmes identitaires de conflits entre les majorités communautaires qui se trouvent dans les Etats fédérés et les autres groupes. Et ces problèmes-là peuvent devenir des problèmes violents. L’Etat unitaire décentralisé permet d’introduire un certain niveau d’autonomie mais encore faut-il que l’Etat ait un certain niveau économique pour que les collectivités territoriales puissent bénéficier non seulement d’un transfert de compétences mais aussi d’un transfert significatif de ressources. Voilà les éléments qui dépendent.

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Est-ce que les collectivités territoriales sont prêtes du point de vue économique à produire la ressource qui peut leurs permettre de vivre ou de fonctionner ?

Elles ne sont pas prêtes parce que les ressources fiscales sont essentiellement contrôlées par l’Etat central qui lui-même, peine à collecter ces ressources. Donc il est réticent à transférer ces ressources au niveau des collectivités territoriales décentralisées. Ça c’est l’une des difficultés pour finaliser la décentralisation. L’autre difficulté est d’ordre technique. L’expertise n’est pas suffisante au niveau des collectivités territoriales décentralisées et il faut toujours requérir celle qui est concentrée au niveau de l’Etat central pour agir dans un certain nombre de domaines.

C’est notamment les domaines proprement techniques, les domaines d’ingénierie par exemple. Mais en ce qui concerne l’administration, il n’y a pas un personnel d’administration suffisant qui soit à mesure de contrôler et de gérer de manière appropriée les collectivités territoriales décentralisées que ce soit les municipalités ou demain, si on les met en place, des conseils régionaux.

Source : L’Anecdote n°1046


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