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Ce que pense certains jeunes du Grand-Nord de l’interdiction du Mouvement 10 millions de Nordistes

2809 11456 le journaliste camerounais guibai gatama lance un concept d observation

Par arrêté le 18 novembre 2020, le ministre de l’Administration territoriale, Paul Atanga Nji a interdit la plateforme « 10 millions de Nordistes » crée par le journaliste Guibaï Gatama pour défendre les intérêts des populations des trois régions septentrionales. Dans sa décision, le patron du commandement territorial arguait que ladite plateforme «mène des activités contraires à la Constitution du Cameroun», susceptibles de porter atteinte à l’unité nationale du pays. L’idée est partagée par plusieurs jeunes issues de ces régions, rencontrées par lebledparle.com.


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Guibai Gatama (c) Droits réservés

Le soutien des auorités locales au président de la République

Quelques jours après la suspension du « Mouvement 10 millions de Nordistes », des appels à condamnation et au soutien du président de la République se font déjà voir sur l’espace public. Le 28 novembre 2020, a été organisée dans les services du gouverneur de la région de l’Extrême-Nord, une manifestation avec pour thème, « Maroua dit non aux 10 millions des Nordistes et réitère son soutien total et sans réserve à son excellence Paul Biya ». En substance, il était question pour les initiateurs de ladite manifestation, d’affirmer leur soutien « aux institutions de la République » non sans se désolidariser de l’initiative de Guibaï Gatama, arguant comme Paul Atanga Nji qu’il se ne s’agit ni plus ni moins, que des manœuvres « visant à diviser les Camerounais »

D’autres jeunes du septentrion parlent du Mouvement 10 millions de Nordistes

Approchée par lebledparle.com, la journaliste Marliyatou Hawaou Djika, originaire de l’Adamaoua l’une des régions septentrionales, s’explique : « Je pense que le ministre de l’Administration territoriale a bien fait d’interdire cette initiative. Parce que la déstabilisation d’un pays commence généralement par ce genre de petits mouvements. Les intérêts des Camerounais vont au-delà de 10 millions de Nordistes. On a vu beaucoup de crises au Cameroun et même ailleurs, commencer par ce genre de mouvements. Peut-être que les porteurs de ce projet se cachent derrière une région pour accomplir une mission sombre », a-t-elle indiqué. Un point de vue largement partagé par la plupart des élites politiques originaires cette partie du pays.

Même si le contexte camerounais ne garantit plus la liberté d’opinion lorsqu’il s’agit de parler de l’activité gouvernementale, cet autre jeune de l’Extrême-Nord, sous anonymat estime que le mouvement de Guibaï Gatama revêt une connotation ethnique et du coup ne devrait pas prospérer au Cameroun : « Il est devenu difficile au Cameroun de critiquer publiquement le gouvernement et surtout de revendiquer quelque chose, même un droit. Toute action allant dans ce sens est étouffée à tout prix. La naissance et l’évolution de la crise du Noso a certainement donné une leçon au système. Dorénavant, au vu de ce qui se passe, tout mouvement de revendication va, à tort ou à raison, se heurter à la rigueur de la puissance publique. C’est le cas de 10 millions de nordistes, dont la revendication pour ma part, revêt quelque part une connotation ethnique, tout comme l’insertion dans de grandes écoles, dans la Fonction publique l’est souvent. Et si toutes les ethnies forment des mouvements identiques, que deviendrait le pays ? On plongerait dans une guerre intertribale », soutient-elle.

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Pour ce autre jeune toujours à visage couvert, l’interdiction du Mouvement 10 millions de Nordistes peut se recevoir dans deux sens. « Je pense que c’est une bonne et mauvaise idée en même temps… Une bonne idée parce que si le gouvernement laisse prôner ce mouvement, nous risquons de pencher vers le NOSO. Car à travers ce mouvement, les nordistes ne se laisseront pas faire comme d’habitude (dans les concours, le développement des villes, etc.) et vont chercher avec le temps à revendiquer leurs droits. À la longue, ils manifesteront leur colère à travers les marches et les revendications. Et s’ils réussissent leur coup, il y aura forcément la naissance d’autres mouvements qui chercheront aussi à se faire entendre ». Pour lui, « Ce mouvement est une bombe à retardement » dont il faut neutraliser.

Toutefois, il estime qu’on ne peut pas totalement botter en touche, dans la mesure où son contenu véhicule un message vrai, car « Tout ce qu’il défend est réel. Nous rencontrons la sous scolarisation, la précarité, la pauvreté, la misère et tas d’autres fléaux sociaux. Ce n’est pas pour autant dire que d’autres régions ne rencontrent pas ces problèmes. Mais au Septentrion c’est plus visible. On ne dirait même pas ces parties du pays se trouvent au Cameroun. Nous sommes au 21e siècle et il y a toujours les enfants qui s’asseyent à même le sol, sans oublier les salles des classes qui sont en sureffectif. En plus de cela, il y a peu d’écoles. Donc ce mouvement devrait bel et bien exister, car il chercher à promouvoir le développement du Septentrion qui est délaissé », estime-t-il dans un second temps.

Le gouvernement perd son temps…

Pour Abdouraman Djibril Le Béni, le gouvernement a interdit quelque chose qui n’existe pas du point de vue de la loi. Il pense ce pendant que si les initiatives similaires ont existé sans posé de préjudice aux populations par le passé, l’interdiction du Mouvement 10 millions devrait exercer. À en croire ce dernier, il ne revient pas à Paul Atanga Nji d’interdire ce mouvement, mais au Procureur de la République :

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« De manière officielle, le mouvement dénommé 10 Millions de Nordistes n’existe pas. Comment interdire ce qui n’existe donc pas alors ? C’est une peine perdue. À ce que je sache, la loi n’interdit non plus le fait que les individus appartenant à une même sphère géographique puisque se constituer en association. 11 millions d’électeurs lancé par monsieur Cabral Libii, jadis candidat à la dernière élection présidentielle de 2018 au Cameroun a existé, le mouvement Survie Cameroon lancé par le Pr Kamto, a également existé. Alors si aujourd’hui les Nordistes ont estimé qu’ils doivent aussi se constituer en mouvement pour défendre leurs intérêts ou revendiquer leurs droits, c’est aussi légitime parce que la loi autorise cela. Cependant, si le mouvement en question vise à fragiliser l’unité nationale comme l’a dit un certain ministre de la République, si ce qu’il dit s’avérait vrai, alors c’est au Procureur de la République de saisir les responsables de ce groupe et leur sommer de cesser leurs activités qui compromettent la cohésion nationale. Mais jusqu’ici, nul ne peut certifier l’existence légale de 10 Millions de Nordistes. Accorder de l’importance à ce qui est dans l’ombre oubliant les vraies causes qui nous interpellent à trouver les solutions d’urgence, je crois que c’est perdre le temps en passant à côté de la plaque », a-t-il formulé.

Naissance et mort du Mouvement 10 millions de Nordistes

Il aura vécu 5 mois. Le Mouvement 10 millions de Nordistes voit le jour le 27 juin 2020 et vise selon son porte-parole, « à promouvoir les intérêts du Grand Nord dans un esprit républicain ». Son nom puise dans l’effectif de la population des trois régions septentrionales, contenu dans le rapport du recensement au Cameroun. En 5 mois d’existence, le Mouvement a exposé plusieurs préoccupations des populations du Grand-Nord sur l’espace public. Le dernier cas en date est le concours de l’Enam.

Le 18 novembre 2020, le gouvernement camerounais a constaté que la plateforme créée par le journaliste Guibai Gatama pour défendre les intérêts des régions septentrionales du pays n’a fait l’objet d’aucune déclaration et va à l’encontre de la Constitution.


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