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Cameroun : Un Avocat demande à Jean De Dieu Momo de défendre la justice infiltrée par les sécurocrates du régime de Yaoundé

Jean De Dieu Momo

Le camerounais Me Christian Bomo Ntimbane, Avocat au Barreau de Paris a adressé ce jeudi 28 février 2019, une lettre ouverture à son confrère le Ministre délégué auprès du Ministre de la justice Jean De Dieu Momo.  La lettre de Me Christian Bomo Ntimbane dont LeBledparle.com a eu une copie porte sur la dernière sortie du Mindel Minjustice sur les réseaux sociaux.


Jean De Dieu Momo
Jean De Dieu Momo – capture photo

En effet, dans cette sortie médiatique sur les réseaux ou médias sociaux, Jean De Dieu Momo a demandé aux Avocats de se mettre du côté des institutions de la république et surtout de les défendre. Ce qui n’a pas plu à son confrère dans l’Avocature pour la simple raison que ce n’est pas leur rôle.

Bien plus, il invite le défenseur d’hier des causes nobles et juste comme l’affaire des neuf de bépanda à défendre le pouvoir judiciaire, comme l’ancien ministre de la justice et confrère, feu Me Douala Moutomé.

« Près de 20 ans après l’Avocat MOUTOME, vous êtes quelque peu à ce poste. Soyez dignes de ce confrère en sanctionnant toutes ces multiples violations des droits de la défense observée dans le quotidien policier et administratif camerounais. Combattez les injustices. Défendez les libertés. Défendez les droits de l’homme. Surtout rappelez aux autorités administratives, policières et militaires de notre pays que seule la justice en d’autres termes le pouvoir judiciaire a le droit de priver sauf cas de grand banditisme un homme de sa liberté. Dites-leur que la police judiciaire est sous la responsabilité des procureurs et non de leur hiérarchie administrative », suggère Me Christian Bomo Ntimbane.

La justice camerounaise est aux ordres d’après Me Christian Bomo Ntimbane et il faut l’arracher entre les mains des barons du régime actuel. « En le faisant, Monsieur Le Ministre et cher confrère, vous aurez protégé et défendu nos institutions principalement l’institution judiciaire qui subit les affres et immixtions inadmissibles des sécurocrates de tout bord », conclue-t-il.

Ci-dessous, l’intégralité de la lettre ouverte de Me Christian Bomo Ntimbane à Jean De Dieu Momo

LETTRE OUVERTE A MONSIEUR JEAN DE DIEU MOMO, MINSTRE DELEGUE AUPRES DU MINISTRE DE LA JUSTICE DU CAMEROUN.

Monsieur le Ministre.

Il y a quelques temps vous avez publié sur votre mur Facebook une tribune sur les rapports entre l’Etat et les Avocats. Vous avez alors indiqué que les Avocats devaient se mettre du côté des institutions et les défendre. C’est dans cette logique que va s’inscrire cette lettre ouverte que je me permets de vous adresser en réaction à votre appel.

Monsieur le Ministre, défendre les institutions, ce n’est rien d’autre que défendre l’équilibre institutionnel c’est -à-dire la séparation des 3 pouvoirs qui permettent à l’Etat républicain de fonctionner. C’est la résultante de ce principe de Montesquieu dans son célèbre ouvrage : l’Esprit des Lois : et selon lequel : “Pour qu’on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir“.

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En suivant votre prestigieuse nomination dans le triumvirat composé des 03 ministres qui ont la charge du Ministère de la Justice au Cameroun et contrairement à de nombreux autres confrères aux enthousiasmes mesurés, j’étais pleinement satisfait. Parce que je vous connais. Vous avez été, durant votre exercice professionnel comme Avocat, un des défenseurs acharnés des droits des faibles faces aux puissants. Je me souviens encore de votre détermination à défendre les 9 pauvres jeunes du quartier Bepanda à Douala qui avaient été assassinés par des membres de nos forces de l’ordre pour une affaire de bouteille à gaz prétendument volée à la maîtresse d’un chef de la gendarmerie locale. Ce combat, il faut le reconnaître vous l’avez mené au péril de votre vie. Vous aviez en face de vous la haute hiérarchie militaire dont un Général, un colonel et de nombreux officiers supérieurs et gendarmes de rang. Par votre juste obstination à la manifestation de la vérité, certains d’entre eux furent reconnus coupables devant le tribunal militaire de Yaoundé. Votre courage lors de ce procès s’apparenterait à celui que devrait s’armer un Avocat qui déciderait aujourd’hui de défendre ces pauvres femmes de l’extrême-nord et leurs bébés au dos recevant à bout portant des rafales de balles de nos soldats.

Et pourquoi défendre de telles causes relèverait de l’exploit dans notre pays ? Tout simplement parce que les Avocats dans l’exercice de leurs fonctions de défense sont menacés et régulièrement intimidés.

C’est devenu une banalité que des Avocats soient interdits de rencontrer leurs clients gardés à vue, s’ils ne sont pas tout simplement molestés, alors que des dispositions pertinentes de notre code de procédure pénale dont votre Ministère est le principal garant, prescrivent clairement que :

Article 122 (3) du Code de procédure pénale :

 » La personne gardée à vue peut, A TOUT MOMENT, recevoir aux heures ouvrables la VISITE DE SON AVOCAT et celle d’un membre de sa famille, ou de toute autre personne pouvant suivre son traitement durant la garde à vue. »

Monsieur le Ministre et cher confrère pour coller à l’actualité, des Avocats ont été interdits de rencontrer leurs clients pendant des jours dans les affaires des Militants du MRC. Dernière en date, notre confrère Emmanuel SIMH a été interdit de visite à sa cliente Maître NDOKY par un responsable de la police judiciaire à Yaoundé.

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Empêcher aux Avocats d’assister leurs clients dans les commissariats et gendarmeries c’est paralyser le fonctionnement du pouvoir judiciaire. C’est détruire l’équilibre de nos institutions. C’est affaiblir le droit pour y faire régner la terreur. Résultat des courses le Cameroun ne convainc plus qu’il est un Etat de droit encore moins un Etat de justice. Parler d’un procès juste et équitable au Cameroun relève tout simplement d’une vue de l’esprit quand bien même le droit aurait été dit. La majorité des camerounais n’y croit plus.

Monsieur le Ministre, Il est souvent dit que nos aînés sont nos inspirateurs. A cet effet, je voudrais pour terminer rendre un vibrant hommage au regretté confrère Maître Douala MOUTOME alors Ministre de la justice qui avait fait adopter les premières lois sur les libertés au Cameroun. Notamment celles qui abolissaient les infractions à caractère politique et les lois dites de subversion qui les réprimaient. On se souvient encore de ses sorties publiques à la CRTV où il dénonçait publiquement les interférences de l’exécutif sur le judiciaire alors qu’il était Ministre de la justice. Ou encore de ses célèbres circulaires qui interdisaient de régler les affaires civiles dans les commissariats ou qui signifiaient clairement aux membres du gouvernement que seuls le Président de la République et les députés bénéficiaient des immunités et qu’il se refusait d’intervenir auprès de la justice pour instruire l’arrêt des poursuites contre les membres du gouvernement faisant l’objet de citations directes.

Près de 20 ans après l’Avocat MOUTOME, vous êtes quelque peu à ce poste. Soyez dignes de ce confrère en sanctionnant toutes ces multiples violations des droits de la défense observée dans le quotidien policier et administratif camerounais. Combattez les injustices. Défendez les libertés. Défendez les droits de l’homme. Surtout rappelez aux autorités administratives, policières et militaires de notre pays que seule la justice en d’autres termes le pouvoir judiciaire a le droit de priver sauf cas de grand banditisme un homme de sa liberté. Dites-leur que la police judiciaire est sous la responsabilité des procureurs et non de leur hiérarchie administrative.

En le faisant, Monsieur Le Ministre et cher confrère, vous aurez protégé et défendu nos institutions principalement l’institution judiciaire qui subit les affres et immixtions inadmissibles des sécurocrates de tout bord.

Cordialement.

Me Christian Bomo
Me Christian Bomo Ntimbane – capture photo

Me Christian Bomo Ntimbane.


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