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Chronique : 22 Septembre 2020, quelles images!

Nka Pierre

Le journaliste et politologue Pierre Nka propose aux lecteurs une réflexion sur les marches pacifiques du mardi 22 septembre 2020 au Cameroun. Il tire des leçons et propose la poursuite du Dialogue qui est encore possible selon lui. C’est ce que le leader du Mrc n’a fait que le demander depuis. La décision de prendre la Voie de la rue ne s’est pas faite du jour au lendemain.


Nka Pierre
Pierre Nka – DR

La surenchère du gouvernement. Peut-on dire. En réalité, au regard de la militarisation du pays pendant plusieurs jours, Pschiit est le bon mot pour décrire l’action des constructeurs de la figure de l’ennemi à l’intérieur du pays.

En réalité, au soir du 22 septembre 2020, le plan insurrectionnel n’a pas été clairement détaillé par la machine administrative. Est-ce à dire qu’il reste secret ou alors il n’existait pas un?

Au soir du 22 septembre 2020, pas un communiqué officiel du gouvernement. Ce jour, le Pr. Jacques Fame Ndongo a plutôt publié un autre communiqué avec l’entête du RDPC. Il appelle le MRC à un débat. C’est tout dire du caractère de ce qui se joue au Cameroun.

MRC et RDPC sont des partis politiques. Une affaire politicienne donc au final. D’où vient-il que les fonctionnaires de police, de la gendarmerie soient mobilisés pour le jeu politicien?

C’est la première image d’une collusion entre le RDPC et l’Etat. Mais pour qui connaît la période 1982-1985, vous dira comment la question entre suprématie du parti unique à l’époque sur l’Etat a été gagnée par M. Paul Biya. Fondamentalement, l’Etat est au-dessus.

Le 22 septembre 2020 a aussi montré comment des acteurs politiciens mobilisent souvent la force publique et les accessoires que leur statut de fonctionnaire leur donne.

Lors des échéances électorales, ce sont les CA et les bons de carburants. Après, on a recours à autres choses. Souvent même des recrutements au faciès pour récompenser les gens et se pérenniser. C’est de bonne guerre dans ce qu’il convient d’appeler redistribution des symboles du pouvoir.

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Cette façon de faire donne la photographie du patrimonialisme. Parce que le RDPC ne peut convier le MRC au dialogue en maintenant ses membres en prison. Ou encore en quasi résidence surveillée. Ce qui montre que lors du dialogue ou débat, s’il a lieu, il ne sera pas d’emblée équilibré. C’est au final l’image d’une équipe de football lors d’un « coup do » au quartier qui a acheté l’arbitre et des gros bras avant le match. Tout but de l’adversaire sera systématique refusé le cas échéant.

Cette absence de fair-play est contraire à la démocratie, le pire des systèmes de gouvernement lorsqu’on exclut les autres.

Cette démocratie s’est exprimée le 22 septembre 2020. Les images des marcheurs dans l’arrière-pays, notamment la région de l’Ouest et dans une certaine mesure Douala montrent qu’on peut faire autrement.

À Bafang par exemple, l’image des fonctionnaires de la gendarmerie est à saluer. Me dira-t-on, c’est à mille lieux de Yaoundé, le cœur du pays. Il ne faut pour autant pas négliger lorsqu’on revoit l’image des forces de gendarmerie démarrant leur voiture à cause des projectiles des manifestants après l’usage de gaz lacrymogènes.

Dans un tel nuage, on a l’image de l’anarchie. Elle ne touche plus forcément les acteurs politiciens, mais aussi le 4e pouvoir avec ces hommes de medias interpellés à Douala.

Si on embastille tout le monde, quel sera l’issue ?

Difficile de le dire. Une simple image donne la réponse. L’assaut des Camerounais dans les ambassades à l’étranger. Ce sera sans doute la réponse la plus plausible si rien ne change à l’intérieur du pays désormais lié avec l’extérieur.

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Dans une telle configuration, les regards du monde seront plus nombreux sur le Cameroun. Pas pour célébrer Roger Milla, le plus vieux buteur de la coupe du monde. Mais, l’on mettra des visages dans la liste rouge.

Bien plus, les potentiels investisseurs auront peur de la destination Cameroun. A cause du visage d’une gouvernance qui peut faire autrement en tuant simplement les seuls intérêts personnels pour des compromis par un dialogue.

En démocratie, une mobilisation qui ne mobilise pas à cause de verroux sur les libertés publiques créée une bombe à retardement. Des mobilisations à répétition sont sources de malaise et d’incertitudes pour les Citoyens passifs ou actifs. En réalité, le 22 septembre 2020 a montré le besoin ardent de faire de la démocratie et des droits de l’Homme, les faces d’une même médaille.

Parce que, le monde regarde le Cameroun. Que dira le citoyen Allemand dont le pays finance la police camerounaise qui s’oppose à l’exercice d’une liberté publique? Le Cameroun peut-il continuer à recevoir de l’aide pour sa police et sa gendarmerie voire ses militaires pour embastiller l’expression des libertés publiques? Si c’est vrai, ces bailleurs bilatéraux et multilatéraux seront tenus pour responsables.

30 ans après le retour au multipartisme et des libertés publiques, d’expression, le Cameroun peut faire autrement. Ce ne sont pas les tables qui manquent pour un débat franc avec obligation du respect du Consensus. On se connaît.


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