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Caroline Meva : « Que ceux qui sont au pouvoir aujourd’hui n’oublient pas que la roue tourne »

Caroline Meva

L’épouse de l’ancien ministre des Finances Abah Abah Polycarpe à travers une publication sur Facebook le mercredi 16 septembre 2020, dénonce le musèlement du peuple camerounais et condamne la manipulation des élites politiques qui soutiennent la « dictature ».


Caroline Meva
Caroline Meva – capture photo

« Je dénonce ici le rôle trouble de certaines élites qui, au lieu de promouvoir et de veiller au respect des règles,  principes et valeurs de la démocratie,  cautionnent ces dérives d’une autre époque, entreprennent plutôt de les justifier pour des prébendes ou des strapontins. Pour cela, ces élites instrumentalisent et fanatisent les populations  qui les suivent aveuglément… jusqu’à l’abîme », déclare la romancière camerounaise, par ailleurs ex fonctionnaire au ministère des finances.

Lebledparle.com vous propose l’intégralité de la tribune.

LA RÉVOLTE COMME CONSÉQUENCE DU MUSÈLEMENT.

Nous assistons en ce moment à un bras de fer entre le Gouvernement et le MRC, dirigé par Maurice Kamto. La manifestation de ce parti politique prévue le 22 septembre 2020 a été interdite sur l’ensemble du territoire camerounais. Il est reproché à Monsieur Kamto de vouloir provoquer une insurrection populaire, afin renverser Monsieur Biya et de prendre le pouvoir à sa place Biya. Soit !

Le Cameroun est censé être une démocratie, à savoir  une forme de gouvernement dans laquelle la souveraineté appartient au peuple, qui l’exprime par les urnes dans le choix de ses dirigeants. Notre pays a un régime présidentiel, ce qui veut dire que l’exercice du pouvoir au sommet de l’Etat est limité dans le temps, il n’est donc pas éternel. Ce qui signifie aussi que tôt ou tard, Monsieur Biya devra laisser la place à un autre camerounais, soit par les urnes, soit de manière naturelle, car c’est le sort réservé à tout être humain, sans exception.

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Par ailleurs le but légitime de tout parti politique est la conquête du pouvoir. Alors, d’où vient-il que le simple fait pour un parti politique d’évoquer le départ de Paul Biya soit considéré comme un crime de lèse-majesté, soulève un tollé général, une levée de boucliers et des cris d’orfraies indignées de la part de ses fidèles ? D’où vient-il que l’on s’insurge, que l’on soit outrés parce que Monsieur Kamto a déclaré vouloir faire partir Monsieur Biya, puisque cette éventualité est inscrite dans notre Loi Fondamentale ?

LES CONSÉQUENCES DU MUSÈLEMENT SYSTÉMATIQUE DE CERTAINS.

Pour être crédible,  un régime démocratique se doit de respecter un certain nombre de règles, de principes et de valeurs universelles, dont la liberté d’exprimer ses opinions par le biais des manifestations publiques par exemple. Mais quand ce droit de manifester n’est accordé qu’à certains et systématique refusé à d’autres, il y a un sérieux problème d’injustice et de manque d’équité qui frise l’arbitraire. À ce moment-là, nous basculons dans la dictature et la pensée unique  Ce n’est pas la loi qui est scélérate dans ce cas, c’est son application partiale qui l’est.

Dans une démocratie, toutes les parties devraient être autorisées à s’exprimer librement. Parlant de la liberté d’expression, le Président Biya l’a dit lui-même : personne n’est plus obligé de prendre le maquis dans notre pays pour s’exprimer. Mais quand cette liberté d’expression par la manifestation est systématiquement refusée à certains, ceux-là se voient obligés de réagir d’une façon ou d’une autre pour pouvoir exercer leur droit. Quand le dialogue avec les autorités est impossible, le seul recours qui reste à un peuple muselé est la révolte.

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La manifestation, est comme une soupape de sécurité sur le plan social. Si la soupape du dialogue est obstruée, la pression au sein de la société  monte progressivement et le système finit par exploser. La déstabilisation de la société est donc la  conséquence de la rupture du dialogue et du musèlement de certains acteurs de la vie publique.

Je dénonce ici le rôle trouble de certaines élites qui, au lieu de promouvoir et de veiller au respect des règles,  principes et valeurs de la démocratie,  cautionnent ces dérives d’une autre époque, entreprennent plutôt de les justifier pour des prébendes ou des strapontins. Pour cela, ces élites instrumentalisent et fanatisent les populations  qui les suivent aveuglément… jusqu’à l’abîme.

Que ceux qui sont au pouvoir aujourd’hui n’oublient pas que la roue tourne, que rien n’est éternel et que demain ils se retrouveront peut-être dans l’opposition, et ils auront beau jeu de réclamer ces libertés qu’ils refusent aux autres aujourd’hui. Il serait temps pour eux, de lever leurs yeux de leur nombril et de regarder au-delà du bout de leur nez.


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