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Tribune : Un Prêtre écrit à Paul Biya et lui demande de passer la main comme Moise a fait avec Josué

Paul Biya jovial

Dans sa chronique dominicale publiée le 25 avril 2020, le Prêtre jésuite, Ludovic Lado a adressé une lettre ouverte au Président de la République et lui suggère de déposer son tablier pour que quelqu’un d’autre le porte.


Paul Biya jovial
Paul Biya – DR

L’homme d’Eglise fait d’abord le constat selon lequel, le Chef de l’Etat est devenu rare comme Jésus après sa résurrection. Autrement dit, depuis son apparition devant l’ambassadeur de France, il est de nouveau invisible.

Il se félicite de la publication du compte rendu du rapport d’enquête sur le drame de Ngarbuh, mais le point focal de sa lettre ouverte est la gestion de la crise sanitaire du Covid-19 au Cameroun. Il pense que le silence de Paul Biya traduit le fait qu’il ne peut plus pour gouverner. « Ce silence est un signe qui ne trompe pas : vous avez tout donné et il reste plus rien », déclare le Jésuite.

Face à son constat, il propose à la pré-émince institutionnelle du pays d’abdiquer. « Monsieur le Président, je vous exhorte donc à passer la main et à vous retirer, comme jadis Moïse devenu vieux passa la main à Josué, comme Jésus en fin de mission sur terre passa la main à ses disciples et disparut de leurs regards: « Alors, leurs yeux s’ouvrirent, et ils le reconnurent, mais il disparut à leurs regards » (Lc 24, 31). Oui, c’est le moment de disparaître à nos regards, M. le Président, pour que le Cameroun poursuive son chemin. Vous avez fait votre part et c’est le moment du départ », suggère-t-il.

Lebledparle.com vous propose l’intégralité de la lettre ouverte.

CHRONIQUE DOMINICALE 26-04-2020: MA TOUTE DERNIÈRE LETTRE OUVERTE AU PRÉSIDENT PAUL BIYA

Excellence, Monsieur le Président,

Vous êtes devenu rare comme Jésus après la résurrection : « Alors, leurs yeux s’ouvrirent, et ils le reconnurent, mais il disparut à leurs regards » (Lc 24, 31), lirons-nous dans l’évangile de ce dimanche. Ce verset m’a rappelé votre récente, mais furtive, réapparition dans les médias en compagnie de l’Ambassadeur de France au Cameroun. Mais à peine vous a-t-on reconnu que vous avez disparu de nouveau. J’espère que vous vous portez bien en dépit de la crise sanitaire désolante qui attriste le monde comme les disciples d’Emmaüs : « De quoi discutez-vous en marchant ? Alors, ils s’arrêtèrent, tout tristes. » L’un des deux, nommé Cléophas, lui répondit : « Tu es bien le seul étranger résidant à Jérusalem qui ignore les événements de ces jours-ci. ». Oui, bien sûr, monsieur le Président, que vous n’ignorez pas les « événements de ces jours-ci. » (Evangile).

Monsieur le Président, je tiens d’abord à vous remercier d’avoir permis que la vérité sur les massacres de Ngarbuh soit dite au cours de la semaine passée. J’en ai été très consolé. C’est un rayon lumineux dans le ciel ténébreux de la guerre qui ravage les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest depuis quatre ans. Dire la vérité est un acte divin. Mentir est un acte diabolique, justement parce que les saintes écritures nous disent que le Diable ment et tue : «Il a été meurtrier dès le commencement, et il ne se tient pas dans la vérité, parce qu’il n’y a pas de vérité en lui. Lorsqu’il profère le mensonge, il parle de son propre fonds; car il est menteur et le père du mensonge” (Jn 8, 44). Tuer des innocents est déjà un crime ; y ajouter des mensonges est un sacrilège. Vous avez dû réaliser que vos collaborateurs les plus proches sont des menteurs professionnels. La vérité est qu’ils vous mentent souvent et continueront à vous mentir. C’est leur mode de gouvernance : mentir, tricher, falsifier, travestir, frauder, dissimuler, détourner ! Désormais, ils se servent de vous pour se servir. Désormais ils vous font signer et endosser du n’importe quoi ! Ils ne vous aiment pas.

Mais je vous écris, monsieur le Président, et c’est la toute dernière lettre que je vous adresse avant la fin de votre règne, pour partager avec vous mon interprétation de votre silence absolu pendant la crise sanitaire actuelle qui constitue « les événements de ces jours-ci ». Il convient d’en tirer les conséquences devant Dieu et devant les hommes. Ce silence est un signe qui ne trompe pas : vous avez tout donné et il reste plus rien. En son temps, « Moïse dit à l’Eternel: ‘Que l’Eternel, le Dieu qui donne le souffle à toute créature, établisse sur l’assemblée un homme ; qui sorte et rentre à leur tête, qui les fasse partir en campagne et en revenir, afin que l’assemblée de l’Eternel ne ressemble pas à des brebis qui n’ont pas de berger’» (Nombres 27, 15-17). Votre silence de ces derniers mois a donné du Cameroun l’image d’un troupeau sans berger.

Monsieur le Président, je vous exhorte donc à passer la main et à vous retirer, comme jadis Moïse devenu vieux passa la main à Josué, comme Jésus en fin de mission sur terre passa la main à ses disciples et disparut de leurs regards: « Alors, leurs yeux s’ouvrirent, et ils le reconnurent, mais il disparut à leurs regards » (Lc 24, 31). Oui, c’est le moment de disparaître à nos regards, M. le Président, pour que le Cameroun poursuive son chemin. Vous avez fait votre part et c’est le moment du départ.

Monsieur le Président, je vous exhorte à consacrer les dernières années de votre vie à la préparation de votre rencontre avec Dieu, entouré de l’affection de votre famille. C’est ce que j’ai commencé à faire moi-même, car ce n’est pas sensé de vivre comme si on n’allait jamais mourir. Dieu vous demandera certainement des comptes de votre gestion du Cameroun. Mais n’oubliez pas qu’il est miséricordieux. C’est pourquoi je plaide pour que le peuple camerounais vous accorde une amnistie générale, à vous et à votre famille, et que cette absolution collective et générale devienne le socle du Cameroun nouveau à bâtir.

Je vous prie, Monsieur le Président, de recevoir mes salutations pascales.

Ludovic Lado SJ

Citoyen camerounais et Jésuite.


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