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Boris Bertolt : «les gouvernements dictatoriaux qui oppriment leurs peuples utilisent le droit pour organiser des politiques de discrimination, d’exclusion et d’hégémonie »

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Après l’Assemblée nationale, le Sénat a adopté le jeudi 19 décembre 2019, le projet de loi portant Code général des Collectivités territoriales décentralisées. Dans une tribune publiée sur les réseaux sociaux le vendredi 20 décembre 2019, Boris Beertolt, activiste politique et influenceur web jette un regard critique sur cette nouvelle loi.


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Boris Bertolt – DR

Lebledparle.com vous propose l’intégralité de la chronique.

CE QUE JE PENSE PROFONDÉMENT DE L’ARTICLE 246 SUR L’AUTOCHTONIE

L’apartheid en Afrique du Sud était légal. Le Nazisme sous Hitler en Allemagne était légal. La ségrégation raciale aux États Unis était légal. L’exclusion des ressortissants étrangers et du Nord en Côte d’Ivoire était légal et le racisme contre les Hutu était légal. Tous les gouvernements dictatoriaux qui oppriment leurs peuples ont toujours utilisé le droit pour organiser des politiques de discrimination, d’exclusion et d’hégémonie.

Ce qui est en cause dans l’article 246 de la loi sur les collectivités territoriales décentralisées qui introduit l’autochtonie ce n’est pas le rejet de la nécessité pour un État de protéger les minorités. Encore qu’il semble important que l’on puisse définir anthropologiquement et historiquement dans un premier temps les peuples qui constituent des minorités ou peuples autochtones au Cameroun.

Ce qui est encore moins en cause c’est le refus de la nécessité pour un État de gérer sa diversité. D’ailleurs c’est cette reconnaissance de l’importance de la prise en compte des équilibres ethniques dans l’élaboration des politiques publiques qui justifie la pratique de l’équilibre régionale bien que dans son implémentation actuelle elle pose encore certains problèmes.

Ce qui est en cause mes chers compatriotes sur l’article 246 c’est le sentiment que certains compatriotes peuvent avoir dans leur propre pays d’être exclus de certaines fonctions du fait de leurs origines ethniques ou celle de leurs parents. Ce n’est donc pas le nombre de maires de la ville qui est en soit problématique, au passage il s’agit seulement de 14. Oh que non. C’est la philosophie qui entoure un tel texte.

Est-il moral, est-il juste que dans un pays dont la constitution consacre l’égalité de tous les hommes devant la loi, la justice, la République certains citoyens ne puissent pas briguer certains postes dans la République. Non mes chers compatriotes, on ne peut pas normaliser le principe de l’exclusion lorsque l’on prétend construire une Nation, le vivre ensemble. A moins que le véritable projet soit de bâtir in fine l’hégémonie d’une classe dominante par l’instrumentalisation du droit.

Certains me rétorqueront que les délégués du gouvernement étaient élus sur la base de leur appartenance à la ville. C’est vrai. Cependant, était-ce pour cela juste? Toutes les pratiques sociales ou politiques parfois communément acceptées par la société ne peuvent pas devenir légales. Car l’une des puissances du droit c’est son caractère contraignant et institutionnel obligeant ainsi les dirigeants à respecter les lois prises. Or toute pratique politique ne saurait devenir légale. Ce n’est pas parce que des ministres organisent des réceptions à chaque promotion et que nous connaissons et acceptons que cela doit pour autant rentrer dans la loi.

Non.Non.Non. On ne peut pas accepter de vivre dans un pays où des citoyens naissent avec des handicaps. Ces camerounais qui contribuent au sein des communautés dans lesquelles elles vivent. Qui paient leurs taxes. Participent au développement local. Bâtissent la République de nos enfants ont droit aux mêmes droits que tous les autres citoyens partout où ils se trouvent. Ils ne méritent pas le “ plafond de verre” comme ces noirs en Occident qui malgré tout leur dévouement pour des entreprises, malgré toute leur intelligence ne parviennent pas à certaines fonctions pour le simple fait qu’ils sont noirs. Être noir est pour eux un handicap.

Mes chers compatriotes, souvenez-vous qu’avant les Jim Crow laws qui légalisent la segregation raciale aux États-Unis, elle se pratiquait déjà. Était-ce pour autant juste et moral. N’oubliez pas que des enfants noirs en Afrique du Sud et aux États-Unis ne pouvaient pas intégrer certaines écoles du fait de leur couleur de peau. Au Cameroun, un gouvernement a décidé que des camerounais ne pourront plus briguer certains postes du fait de leur appartenance ethnique. Encore une fois ce n’est pas le nombre qui est en cause, mais la légalisation même du principe d’exclusion et de discrimination. Est-ce juste et moral?

Tout ce qui est légal n’est pas forcément juste et moral. Tous les hommes sont nés égaux et nul ne devrait être discriminé du fait de sa couleur de peau, de son ethnie, de sa religion et même de son orientation sexuelle. La démocratie se construit dans la diversité.

BORIS BERTOLT

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