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Dieudonné Essomba décrypte le refinancement de l’Eurobond du Cameroun

essom dieudonnn 780

Surfant à contre-courant du ministre des Finances Louis Paul Motaze, l’économiste allègue : « on ne voit pas en quoi on pourrait se réjouir. L’Eurobond est une opération d’ingénierie financière qui n’a aucun impact sur la situation économique réelle. Bien plus, cette opération traduit la plus forte mainmise du FMI sur la gouvernance publique ». C’est le contenu d’une tribune libre partagée sur les réseaux sociaux le 1er juillet 2021.

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Dieudonné Essomba (c) Droits réservés

Sur la communication du Minfi, relative à l’eurobond de 450 milliards

Le Ministre des Finances a fait une Communication au sujet du Cameroun qui vient d’obtenir un montant de 450 milliards de FCFA, dont l’objectif officiel est de « refinancer l’eurobond 2015 ».

Un certain nombre de personnes, à commencer par le Gouvernement lui-même, présentent cette opération comme la preuve d’une crédibilité retrouvée du Cameroun sur le plan international.

Qu’en est-il exactement ?

De manière simple, l’Eurobond actuel du Cameroun est une simple opération de technologie financière qui n’a pas grand-chose à voir avec la situation économique du pays. Il s’agit tout simplement de convertir la dette actuelle du Cameroun en une autre dette de même valeur, mais octroyées à des conditions plus favorables.

Pour bien comprendre le mécanisme, retenons que le Cameroun s’est préalablement endetté sur le marché des Eurobonds en 2015 pour un montant de 450 Milliards, à un taux d’intérêt de 9,5%. Il doit rembourser entre 2023 et 2025.

Cela fera non seulement les 450 Milliards à rembourser, mais des intérêts qui, pour 10 ans, vont cumuler à plus de 350 Milliards. Autrement dit, le Cameroun devra rembourser plus de 800 Milliards de FCFA s’il attend l’échéance.

Face à cette situation, le Cameroun va chercher à limiter la casse et à réduire ce montant. L’une des techniques consiste alors de se débarrasser de cette dette trop coûteuse en la remplaçant par une dette de même valeur, mais moins coûteuse, du point de vue des intérêts.

C’est exactement cela que le Cameroun fait aujourd’hui : il va au marché financier évaluer s’il peut remplacer une dette trop onéreuse en la remboursant par des ressources tirées d’une dette moins coûteuse.

D’un point de vue technique, l’opération engagé par le Cameroun est exactement l‘équivalent d’une réduction du taux d’intérêt de la dette.

Suivant le ministre des Finances, le Cameroun aurait effectivement réussi à réduire ce taux à 5,9%, ce qui est bien une baisse de moitié.

Lorsqu’on a compris ce mécanisme, on peut poser une série de questions :

Question 1 : Pourquoi le Cameroun n’a-t-il pas choisi une dette moins couteuse en 2015, plutôt que de prendre une dette trop couteuse pour tenter de la reconvertir après ?

On a là trois raisons qui cumulent :

– le gouvernement était trop impatient, pour se pencher sérieusement sur les opportunités alternatives de la dette ;

– le marché financier était relativement tendu et les ressources étaient trop rationnées, avec un coût du crédit relativement élevé ;

– le Cameroun ne présentait pas une importante crédibilité pour qu’on lui fasse le crédit à des taux inférieurs ;

Question 2 : quel rôle a joué le FMI ?

Le fait que le Cameroun ait signé un accord avec le FMI et que ce crédit ait été accepté par le FMI est une garantie de remboursement, car le FMI par nature est un aval des pays qu’il contrôle ;

Question 3 : quel est le gain réel du Cameroun dans cette opération ?

Le nouvel Eurobond a des effets d’un crédit-revolving où on reconduit son crédit en prolongeant l’échéance, et le Cameroun gagne également en termes de taux d’intérêts.

Mais le capital et les intérêts portant sur les années précédentes de l’ancien Eurobond doivent être payés par le Cameroun. Le gain du Cameroun se limite donc à la baisse du taux d’intérêt permis par le nouvel Eurobond. Ce gain n’atteint pas 100 Milliards.

Question 4 : y a-t-il lieu de se réjouir ?

On ne voit pas en quoi on pourrait se réjouir. L’Eurobond est une opération d’ingénierie financière qui n’a aucun impact sur la situation économique réelle. Bien plus, cette opération traduit la plus forte mainmise du FMI sur la gouvernance publique, car justement, elle entre dans la pratique des ajustements structurels qui commencent toujours par l’assainissement de la situation de la dette, avant d’entreprendre la vraie thérapie !

 


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