in

Dieudonné Essomba : « S’il y a un peuple en Afrique qui a connu les dialogues pour mettre fin aux armes, c’est bien le Tchad… »

Essom.JPG

Dans une tribune faite sur son mur le 22 avril 2021 intitulée « Le Tchad, ses armes et ses dialogues », Dieudonné Essomba démontre que malgré les multiples dialogues qu’a organisés le Tchad pour assurer une paix durable, il continue d’être classé parmi les d’Afrique noire où les armes et les coups d’Etats sont récurrents.

Essom
Dieudonné Essomba (c) Droits réservés

Le record des coups d’Etat

Au moment où le peuple tchadien est dans la consternation totale à la suite de la mort au front contre les rebelles du FACT, du président Idriss Deby Itno, Dieudonné Essomba a recensé la série de coups d’Etat qu’a enregistré le pays en 15 ans. 

« S’il y a un peuple en Afrique qui a connu les dialogues pour mettre fin aux armes, c’est bien le Tchad.

Les gens ne le savent peut-être pas, le Tchad est le prototype d’un pays qui n’a jamais connu la paix, en dehors de l’épisode Deby qui a mis un semblant de stabilité.

Le Tchad a en effet connu les Présidents suivants :

1. Ngarta Tombalbaye (1975-1975), renversé et exécuté après 15 ans de pouvoir

2. Noel Odingar: renversé après de 2 jours de pouvoir.

3. Felix Malloum renversé par coup d’Etat, après 4 ans

4. Goukouni Oueddei, qui passe 37 jours en 1979

5. Lol Mahamat Choua, qui fait juste 5 mois

6. Goukouni Oueddei qui passe encore 3 ans, avant d’être définitivement chassé par Hisseine Habré

7. Hissene Habre qui fait 8 ans, avant d’être chassé par Idriss Deby Itno, puis réfugié et emprisonné au Sénégal.

8. Jean Alingué Bawoyeu, un jour de pouvoir

9. Idriss Deby, le premier réduit l’instabilité et qui lui-même, a échappé à plusieurs coups d’Etat, mais vient de mourir au front d’une guerre.

10. Son fils, qui vient de s’emparer du pouvoir et qui reste cependant menacé par les rebelles qui ont tué son père…», rappelle le consultant médias. 

Historique

Pour Dieudonné Essomba, le climat tendu qui sévit dans ce pays voisin au Cameroun ne date pas de nos jours: 

« Voilà le Tchad. Nous nous retrouvons essentiellement dans un monde de violence où seules, les armes parlent. C’est celui qui a les armes qui s’imposent aux autres et prend le pouvoir. Bien sûr qu’avec la mode de la démocratisation, le putschiste qui a réussi à dominer ses adversaires et les a chassés va entretenir une illusion de démocratie, en autorisant quelques partis faire-valoir mais la configuration du pouvoir ne permet pas un changement de régime autrement que par la force. Aujourd’hui encore, les gens parlent de dialogue. C’est très bien, puisqu’il faudrait y passer de toute façon. Mais il est important de tirer les leçons des dialogues qui ont émaillé l’histoire du Tchad. En effet, quel qu’ait été le Président au Tchad, les Tchadiens et la Communauté Internationale ont toujours tenté de mettre fin aux rebellions en organisant les Dialogues. Celui qui avait permis la cohabitation entre Hissène Habré et Malloum avait abouti au renversement de Malloum. Le fameux Gouvernement d’Union nationale de transition (GUNT) était une coalition de groupes armés qui régnèrent sur le Tchad entre 1979 et 1982. Dirigé par Goukouni, il fut balayé par Hissène Habré», retrace l’ancien fonctionnaire du MINEPAT. 

Pour approfondir :   Coupe du monde féminine 2019 : que va chercher le ministre Kombi Mouellé en France ?

Dialogues stériles? 

Selon l’analyse de l’économiste, ls dialogues n’ont jamais porté de fruit au pays d’Idriss Deby Itno pour plusieurs raisons: 

« Aucun dialogue au Tchad n’a abouti à quoi que ce soit de durable, et les Gouvernements de Transition qui en ont découlé se sont toujours achevé dans la guerre, où le plus fort a fini par l’emporter, avant d’être emporté à son tour par plus fort que lui. C’est qu’en fait, les rebelles vont dans le Dialogue, non pas parce qu’ils croient aux résultats, mais simplement pour gagner du temps, chacun acceptant les résolutions du bout des lèvres, tout en guettant le moment favorable où il pourra porter l’estocade mortelle à ses adversaires. La question de fond est alors la suivante : quelle est la raison fondamentale de cet échec des dialogues au Tchad. Evidemment que ce n’est pas dans le dialogue lui-même, mais dans la manière d’aborder le problème du Tchad. D’emblée, les partenaires qui favorisent ces dialogues et les modèrent partent de l’hypothèse que si le Chef de l’Etat est élu dans des conditions transparentes, alors il sera accepté par tout le monde et il y aura la paix. C’est une très grave erreur d’analyse ! Les élections, aussi parfaites soient-elles, ne peuvent pas suppléer aux défaillances structurelles d’une configuration étatique mal adaptée. Ce n’est donc pas la manière dont on accède au pouvoir qui compte dans un pays comme le Tchad, mais la nature du pouvoir. Ce pouvoir étant hyperconcentré, c’est un seul individu qui contrôler tout et en un seul lieu, Djamena! Le fait qu’un seul individu contrôle toutes le ressources de la Nation, nomme à tous les postes, oriente les investissements là où il veut et distribue les rentes publiques à qui il veut créer de manière objective une intarissable source de conflits violents et sanglants. Lorsqu’à cela, on ajoute que c’est le contrôle de l’Etat donne la possibilité d’une mainmise totale sur les ressources d’un Etat pauvre, aride et étendu, on comprend bien que cette attractivité prenne un caractère explosif et entraine une impossibilité opérationnelle d’entretenir la paix que par les moyens de force. Du fait de cette concentration, le contrôle de l’Etat du Tchad est devenu l’objet d’une violente compétition intercommunautaire qui se concentre de manière itérative entre des clans de plus en plus petits. Le pouvoir fut d’abord détenu par les ressortissants du Grand Sud (Tombalbaye, Malloum) qui furent remplacés par une coalition des populations du Nord (FROLINAT). A l’exercice de ce pouvoir monstrueux, celles-ci n’ont pas pu conserver leur cohésion, éclatant ensuite en multiples rébellions (Goranes, Toubous, Zaghawa, etc.). Mais aussi à l’exercice du pouvoir, même la coalition tribale Zaghawa n’a pu résister à l’éclatement en multiples factions liés à des clans dans une spirale sans fin (Toubas, Bideyates, Kobés, Annas, Boregat…)». 

Que faut-il faire? 

« Enfin de compte, Dieudonné croit en un démantèlement absolu de pouvoir d’Etat qui se trouve entre les mains d’un seul individu pour sauver la pix: Nous sommes clairement dans un monde de fous !Assez étonnamment, le Maréchal Idriss Deby qui était très intelligent avait bien compris le problème et envisagé la bonne solution, avec son projet de fédéralisation du Tchad. Certes et contrairement au Cameroun, très peu de Tchadiens étaient favorables à ce modèle, par ignorance et formatage mental, mais il avait vu juste et on ne saura jamais pourquoi il a abandonné le projet. De manière extrêmement claire, pour mettre la paix au Tchad, il faut absolument démanteler le pouvoir d’Etat qui se trouve entre les mains d’un seul individu à Ndjamena et le disperser entre plusieurs mains autonomes dans des Etats Régionaux. Il n’y aura jamais de paix au Tchad si ce pays n’est pas fédéralisé, comme l’a bien entrevu le Maréchal Idriss Deby. Le problème de ce pays n’est pas ni la démocratie, ni la gouvernance, ni les urnes, mais la concentration excessive du pouvoir d’Etat entre une seule main et un seul endroit, la capitale. Vous ne pouvez pas maintenir la paix avec un tel pouvoir dans un pays aussi pauvre, aussi étendu et aussi désertique !», a-t-il conclu sa tribune. 

 


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Coupler

Bandjoun : Il tabasse à mort son épouse pour soupçon d’infidélité

177726374 4205344599485277 8700320605088852823 n

Malgré la mise en garde de l’opposition tchadienne, la France apporte son soutien à Mahamat Deby