Lire ci-dessous cette lettre ouverte à Calixthe Beyala :
« Lettre à Calixthe,
Il faut du cran pour se taire pendant cinq ans. Et davantage encore pour parler après. Vous l’avez fait. Non pas dans l’hystérie qu’on attribue trop vite aux femmes qu’on veut faire taire, mais dans une lucidité qui fend la boue et met les lâchetés à nu.
J’ai lu vos mots comme on lit un testament de feu. Vous ne demandez ni compassion tiède ni soutien mollement murmuré. Vous tracez une ligne. Une frontière entre ce que vous avez toléré et ce que vous ne tolérerez plus. Et cette ligne, nous sommes nombreux(ses) à la reconnaître. Elle passe aussi dans nos vies. Dans nos silences. Dans nos colères recousues.
Ce que vous dites n’est pas un règlement de comptes : c’est un acte de salubrité. Vous soulevez un couvercle, et dessous, ce ne sont pas seulement les mensonges d’un homme que l’on découvre — c’est toute une structure qui pue : le mépris des femmes, la lâcheté masculine, la connivence sociale. Vous l’appelez par son nom : misogynie. Celle qui tue, insidieusement ou brutalement. Celle que même des femmes parfois perpétuent, convaincues qu’il faut pactiser avec la violence pour survivre.
Mais vous, vous n’êtes pas de celles qui pactisent. Et c’est pour cela qu’ils vous attaquent. Parce que vous êtes debout, libre, entière. Parce que vous ne demandez rien, et surtout pas l’approbation de ceux qui pensent qu’une femme doit se courber pour exister.
Vous êtes romancière, oui. Mais ce que vous venez d’écrire, ce n’est pas un roman. C’est un miroir. Cru, nécessaire, impardonnable. Il reflète ce que l’on ne veut pas voir : qu’une femme puisse être célèbre et pourtant calomniée, riche et pourtant insultée, occidentale et pourtant attaquée. Parce que dans le fond, aucune femme n’est jamais à l’abri dans un monde où la haine du féminin reste la norme.
Alors merci. Merci de ne pas vous être tue un jour de plus. Merci de rappeler à ceux qui voudraient qu’on s’écrase que leur règne est un leurre. Et que chaque mot que vous posez est une brique de plus dans la démolition de leur impunité.
Je vous lis. Je vous crois. Et je suis là avec vos côtés , même de façon virtuelle . Fraternités et courage Grande Dame ! »